Halte-là, voyageur ! Dis-nous donc qui est ton maître, et les raisons qui t’ont poussé à lui prêter allégeance ! Est-ce par conviction, par intérêt, par obligation ? Mon maître après Dieu est mon père, "Empereur de toutes les Espagnes" comme il aime à se faire appeler. Il ne le demeurera plus guère, car c'est sur sa volonté et la mienne que je me trouve aujourd'hui à briguer une autre allégeance et qui fera de Louis de France, si Dieu le veut et si je manœuvre suffisamment bien, mon époux et seigneur.

Si une guerre venait à éclater entre l’Aquitaine, la France, la Normandie et l’Angleterre, que ferais-tu ? Prendrais-tu part au combat ? De quel côté ? Ou bien resterais-tu à l’écart ? La France assurément! Ce royaume est bien trop petit pour y être suffisamment à son aise... Il le faut plus grand... Louis a besoin d'une dame à ses côtés qui sache l'épauler en tout et en particulier dans ce genre de décision, ce que je ne manquerai pas de faire. J'ai tout de même plus d'envergure que de régner sur un mouchoir de manche...

Toutes ces alliances, ces mariages… Qu’en penses-tu ? Servent-ils tes intérêts ? Ou chercherais-tu à les rompre ? Il n'y en à guère qu'un qui m'indispose au point que je cherche à hâter son éclatement... Quant aux autres, je n'en ais cure pourvu qu'ils plaisent à Dieu et qu'ils ne soient pas contraire à mes intérêts ou aux intérêts de la France.

Enfin, dis-nous un peu : plutôt bal ou plutôt tournoi ? Plutôt guerre ou plutôt paix ? Plutôt amour courtois ou plutôt croisade ? Pourquoi l'un sans l'autre? Pourquoi choisir? A Dieu plaise, je les aime tous! Le bal me diverti et me donner l'occasion de briller, toutefois il ne me plait rien tant que de voir jouter à grand fracas d'écus et de lance de preux chevalier. Voilà peut-être le seul et unique trait que je partage avec "l'Aquitaine", nos origines méridionales et le goût du fin' amor. Autant que des exploits chevaleresques. Comme j'aimerais susciter tant la passion qu'un doux sire porte haut mes couleurs dans son triomphe et s'affirme prêt à mourir pour me plaire... Quant à la paix, je la vois comme un interlude parfois nécessaire et heureux car synonyme de prospérité. Mais je ne m'y trompe pas, on ne m'a point élevée dans une tour d'ivoire, mon père a lutté sa vie durant faisant et défaisant ses alliances comme une dame recommence sans cesse son ouvrage de tapisserie. Il n'est pas parvenu à dominer les Espagnes et à devenir grand souverain en chantant seulement de "Te Deum"... La guerre est le lot des gands de ce monde. Qu'elle soit pour la gloire de Dieu ou la gloire d'un royaume ne fait guère de différence, certains combats se doivent d'être menés...