Je suis né dans un milieu favorisé quoique très modeste. Mon père, Philibert, n'était qu'un seigneur effacé entre quelques parcelles de terrains. Je ne m'en suis pourtant jamais plain. Nous avions ce que nous avions. Philibert, c'était le petit seigneur proche de ses paysans. Généreux, patient, il était constamment à l'écoute et ne refusait jamais personne à sa table. Il n'était pas rare que nous mangions dans le jardin du manoir avec quelque bons fermiers du coin. Des repas conviviaux où nous rions tous de bon coeur. C'est lui qui m'envoya, après quelques bévues de jeune loup, en ville pour poursuivre assidûment mon éducation militaire. Je dois dire qu'à l'époque je me fichais pas mal de ce que je deviendrais. Lui et moi étions très proches et nous entendions à merveille, cependant mes responsabilités de guerriers m'obligeaient à m'éloigner de lui et ce jusqu'à sa mort. Quant à ma mère elle avait toujours l'air ailleurs et surement encore aujourd'hui. Je l'ai toujours connu ainsi. Ses journées étaient consacrées au tissage, à ses enfants et aux longues promenades dans les terres qui lui ont souvent valus d'être clouée au lit. Après la mort de mon père elle s'est retirée dans un couvent et je n'ai eu depuis que de relation épistolaire avec elle. Autant dire que la figure maternelle ne m'a pas franchement marqué. Outre mes deux parents j'ai également un petit frère et une petite soeur. Un frère, William, âgée aujourd'hui de 27 ans qui exerce sa profession de prêtre dans l'église de notre village natale. Le portrait craché de ma mère. Effacer, très simple et dévouer il était né pour une vie entièrement consacrée à la religion. Je m'entends très bien avec lui, bien qu'il ne voie pas d'un très bon œil les tournures de ces temps-ci et mon attirance pour Laurence. Pour finir il y a ma " petite soeur ", Louisée. ''Petite soeur " car elle ne l'est que de coeur. Nous l'avons recueilli à la mort de ses deux parents suite à l'incendie de leur ferme. C'est mon père qui lui sauva la vie alors qu'elle n'avait que deux ans. Sachant qu'elle n'avait d'autre famille mon père la prit sous sa responsabilité en la faisant passer pour la petite dernière. Je n'apprenais cela qu'en revenant de la grande ville où je venais de solder mon éducation militaire avec succès. Louisée venait de prendre trois ans et mon père mourut peut après cela. Je trouvais tout d'abord impensable que mon père eut pu décider de faire d'elle sa fille légitime, mais je me prenais très vite d'affection pour cette petite fille qui me faisait voir autre chose que la frigidité de ma mère et mon frère et mes journées de guerriers. Encore aujourd'hui c'est un secret de famille et même elle n'est pas au courant. Louisée ,âgée aujourd'hui de 17 ans, vit avec moi à Hesdin et il n'est pas rare qu'elle m'accompagne lors de mes déplacements. J'ai d’ailleurs tendance à trop la protégée. Je ne vois pour elle que le meilleur et ne laisserais pas n'importe qui poser les yeux sur elle. Je suis très conservateur des liens familiaux. C'est tout simplement que je prenais la place de mon père et que sur un coup de tête et voulant voir mon nom se propager à travers le pays, qu'à 16 ans je prenais les armes pour m’engager auprès du comte de Flandre. Là, je mettais à profit mes apprentissages ainsi que les leçons de mon père. Cette éducation militaire porta ses fruits et me propulsa très vite au plus près de la haute noblesse. Le comte se fit donc généreux et solda mes services, ayant participé à la victoire, en me nommant seigneur d'Hesdin. Mes efforts avaient été couronnés de succès et je savourais ce nouveau titre. J'avais atteint un objectif, qui fut, un jour surement, celui de mon défunt père.
Je prenais place sur de nouvelles terres, dans une nouvelle demeure semblable à un château et je savourais pleinement cette réussite. Je ne délaissais pas pour autant ceux qui avaient partagé ma vie de jeunes vassaux et que j'engageais à mon service. Je pus également offrir une bien meilleure éducation à Louisée ainsi qu'à William. Mon domaine reste un endroit privé où rare sont les nouvelles têtes. Je ne peux évidemment pas refuser les grands de ce monde, mais j'aime n'être entouré que de ma famille.
Mon ambition de jeunes combattants était atteinte et le fut encore plus lors d'une nouvelle guerre opposante une nouvelle fois le seigneur Hainaut au comte et à la comtesse.Un comte en croisade, mais un seigneur bien présent est une victoire de plus. Il ne fait aucun doute que leur titre serait aujourd'hui aux mains de ce Baudouin si le fin stratège que je suis n'avait pas été de leur coter. Je leur suis tout de même redevable d'une unique chose. Sans leurs querelles je n'aurais surement pas tenu autant d'attention sur cet homme et n'aurais jamais pris conscience de la perle rare qu'il cachait derrière lui. A la fin de la guerre, mais surtout à l'arrivée d'un age où je me devais d'être marié j'entrepris de me trouver une femme et mon ambition se fixa soudainement sur cette jeune femme aussi jolie qu'intelligente, Laurence de Hainaut. Une convoitise qui signifierait  briser mes serments envers le comte et la comtesse de Flandre, mais je doute que mon titre soit plus important qu'elle. Je ne cache pas mes prétentions et éloigne de gré ou de force ceux qui pourraient prétendre à ma place. Une chose est certaine, j'obtiendrais la main de cette Dame de Hainaut. Peut importe les montagnes que je devrais traverser ou les champs de bataille que je devrais raser. Mais cette demoiselle serait à moi.
Paris m'évitera sans doute ce désagrément, si s'en fut un. Je serais quelque peut déçu d'obtenir les faveurs de la douce sans grand mal. Je me dois également me trouver un appui pour lequel je puis me battre et ainsi masquer cette conquête amoureuse. Je suis donc très impatient de voir le résultat de cette idée royale de rassembler les seigneurs entre eux.