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 L'Eglise au XIIème siècle

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Deus Ex Machina

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ϟ Lord of Treason ϟ


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MessageSujet: L'Eglise au XIIème siècle   L'Eglise au XIIème siècle EmptyDim 6 Oct - 10:25

Deus Ex Machina  a  dit:


L'Eglise au XIIème siècle

Parce que c'est quand même drôlement compliqué tout ça...




Le Moyen Âge, époque de l'obscurantisme religieux où l’Église impose la terreur par le biais de son Inquisition qui prend plaisir à faire brûler Juifs et sorcières sur la place publique ? Fi de ces idées reçues, les Juifs sont les protégés du pape, on n'a jamais autant brûlé de sorcières qu'à l'époque moderne et l'Inquisition qui ne fut créée qu'en 1199 est considérée comme un progrès en matière de justice et a été plus clémente que les juridictions civiles... Mais alors à quoi ressemble exactement l’Église du Moyen Âge ?

Une place essentielle au sein de la société

La société médiévale est entièrement chrétienne, à l'exception de quelques minorités juives souvent protégées autant par les autorités laïques que religieuses, et la foi ardente que chacun se doit de professer ne s'exprime pas de manière personnelle mais par le biais de cérémonies liturgiques : dans un tel contexte, l'institution ecclésiale occupe une place prééminente car elle fait le lien entre Dieu et le peuple des fidèles.
L’Église chrétienne est fortement hiérarchisée et le pape, à Rome, qui a mené au début du siècle une réforme appelée réforme grégorienne, a un magistère moral et donne les investitures spirituelles aux grands ecclésiastiques des divers royaumes. Ceux-ci sont partagés entre divers diocèses, dessinés aux temps romains, dont évêques et archevêques ont la tête, rendant les sacrements dans leur église cathédrale, entourés de leurs chanoines. À un niveau plus faible, se trouvent les curés des simples paroisses, les cellules de base de la vie quotidienne pour chacun des hommes de cette époque. Une foule de clercs tonsurés sans charge claire sont à leurs côtés, notamment les écoliers, bénéficiant de privilèges accordés aux gens d’Église dont le droit d'être uniquement jugé par celle-ci, ce qu'on appelle le for ecclésiastique. Enfin, le territoire est parcouru par de très nombreux monastères et abbayes dans lesquels vivent des moines et des moniales soumis à une règle de vie souvent stricte. Au XIIe siècle, deux ordres principaux essaiment et se font concurrence : les moines noirs de Cluny dont la maison-mère se trouve en Bourgogne et les moines blancs de Cîteaux dont l'abbaye la plus importante est celle de Clairvaux en Champagne. Chez les femmes, Fontevraud accueille les plus grandes dames de l'aristocratie.
Leur place est d'autant plus prestigieuse car ce sont eux qui possèdent le savoir de la lecture et de l'écriture.

L’Église et la société féodale

L’Église n'est en aucun détachée de la société, elle en fait pleinement partie. Les charges les plus importantes sont âprement disputées entre les grandes familles féodales quand elles ne sont pas déjà « propriété » de certaines d'entre elles : le duc de Normandie nomme directement les évêques de son territoire, le roi de France a un frère évêque de Beauvais et s'est disputé avec Thibaud IV de Blois-Champagne pour l'élection de celui de Bourges, faisant fi des prétendues élections par les chanoines. Les évêchés offrent en effet des revenus très importants et certains sont de véritables seigneuries ecclésiastiques totalement indépendantes comme Reims, Châlons ou Sens. L'évêque est avant tout un seigneur qui peut prêter hommage et à qui on peut prêter hommage, qui peut mener des troupes par lui-même, qui siège au conseil de son seigneur et qui reçoit les impôts de son territoire. Les abus de ces pratiques sont de plus en plus sévèrement sanctionnées par la papauté.
L’Église a cependant tendance à se faire le soutien ferme de la royauté, comptant sur cette institution pour la protéger des coups de main de certains seigneurs violents. Louis VII va être le premier souverain à se servir de ces nouvelles dispositions.
La richesse de l’Église est telle qu'elle est au XIIe siècle la principale mécène dans les arts : on ne compte pas le nombre d'objets liturgiques somptueux qui sont commandés aux peintres et orfèvres. C'est elle qui recopie et conserve les manuscrits enluminés dans ses scriptoria. Mais à partir de la moitié du XIIe siècle, c'est l'art monumental qui est mis à l'honneur par la construction des toutes premières cathédrales gothiques dont l'impulsion est donnée à l'abbaye de Saint-Denis.

Une foi particulière

La population est peu regardante sur la moralité de ses clercs, même si celle-ci s'améliore depuis la réforme grégorienne, tant qu'elle reçoit les sacrements qui marquent la vie de tout bon chrétien : parmi eux, le baptême est évidemment le plus important. Néanmoins, la foi médiévale s'attache tout particulièrement aux saints que l'on présente comme des modèles et dont les reliques sont réputées avoir des pouvoirs miraculeux. A chaque situation de la vie, son saint, et à chaque abbaye ses reliques pour drainer les pèlerins. Si Jérusalem ou Compostelle sont des centres de pèlerinage, la France possède également ses grands saints et ses grandes abbayes : Saint-Denis au nord de Paris est la protectrice de la royauté, Saint-Martin de Tours est dédiée à l'évangélisateur des Gaules. Une foule de pèlerins se déplacent donc de villes en villes dans l'espoir de toucher les reliques ou d'en posséder par eux-mêmes, persuadés de la protection efficace de ce qui ressemble parfois à de simples amulettes !
La foi est plus réfléchie dans les couches supérieures de la société où l'on a accès aux textes et aux débats théologiques parfois bien compliqués qui sont menés dans les écoles parisiennes.

Figures incontournables

Le royaume de France de 1151 est dominé par quelques grandes figures ecclésiastiques que chacun se doit de connaître car elles ont des personnalités écrasantes. C'est surtout le cas de clercs réguliers même si l'archevêque de Reims par sa fonction de légat du pape et de proche de la royauté ou encore un chancelier comme le clerc – quasi inconnu – Cadurc ont des places importantes.
- L'abbé Suger de Saint-Denis était un ami du roi Louis VI, il a été un administrateur éclairé de son abbaye et le premier à impulser une construction gothique. Malgré son âge, il a une place toute choisie au sein du conseil du roi où il occupe un magistère moral et un prestige inégalé depuis sa régence du royaume durant la croisade de 1147-1149. Hélas pour ses partisans, il a quitté ce monde depuis peu, laissant derrière lui un héritage spirituel considérable.
- Pierre le Vénérable est l'abbé de Cluny et est à la tête d'un ordre riche et puissant même si les critiques fusent à son encontre (car il est difficile de garder son idéal de pauvreté dans de telles conditions). Esprit éclairé et intransigeant envers les hérétiques juifs et musulmans même s'il estime qu'on se doit de les combattre par la Parole, il accueille les pécheurs repentis et doit faire face à un début de décadence de son ordre.
- Le dernier et non des moindres, Bernard de Clairvaux est abbé de Clairvaux, la fille de Cîteaux mais par son esprit brillant et sa personnalité écrasante, Bernard a éclipsé Cîteaux qu'il a réformé. Malgré l'idéal de clôture qui est celui des cisterciens, il parcourt la France et l'Europe pour prêcher et donner des conseils aux pouvoirs laïques. Il est de tous les combats, de tous les conseils, n'hésitant pas à se mettre en colère contre le roi lui-même ou à faire condamner ceux qu'il juge dangereux comme Abélard ! Cet infatigable abbé sera canonisé dès 1174.

Le retour des hérésies

Si les hérésies semblaient s'être éteintes au XIe siècle, elles reprennent avec plus de force au XIIe siècle et sont âprement combattues par des personnalités comme Pierre le Vénérable ou Bernard de Clairvaux. Ces hérésies ne remettent en aucun cas en cause l'existence de Dieu ou la chrétienté en elle-même mais davantage l'institution ecclésiastique qu'elles jugent pleine de défauts, notamment trop riche ce qui l'écarte de l'idéal évangélique. Elles se propagent par le biais de prédicateurs comme Henri de Lausanne mort en 1148 qui critiquait la liturgie, la corruption des clercs ou la hiérarchie trop contraignante. Ces prédicateurs sont pourchassés puis condamnés par des conciles mais ont souvent le temps d'aller convaincre certaines populations du bien-fondé de leur pensée.

Dans le sud, un danger d'une toute autre ampleur apparaît avec les débuts du catharisme...




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