Feuille de route Mon coeur est: pris par mon épouse et mes enfants. Je suis né à: Mons, dans le Hainaut A savoir sur ma personne:
Sujet: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 11:23
Baudouin de Hainaut a dit:
Baudouin de Hainaut
"La patience a beaucoup plus de pouvoir que la force."
Je m'appelle Baudouin de Hainaut et suis né en 1108, je suis donc agé(e) de 43 ans, à Mons, dans le Hainaut, je suis donc flamand. Pour de nombreuses raisons que je vous exposerai plus tard, je suis fidèle à moi-même. Pour ce qui est de mes sentiments, bien que je n'aime pas en parler ainsi, je suis marié à Alix de Namur. Mon visage? Il s'agit de Viggo Mortensen trouvé sur Tumblr
Derrière l'écran il y a Moi, j'ai un peu plus de 20ans, je fais des études de geek à temps plein. J'ai connu le forum via Internet, et je pense qu'il est vraiment très chouette, puisque je m'y inscris, mais d'après moi il y manque des gens du Nord, c'est bien le Nord. Je suis plutôt ACTIF, je fais de mon mieux pour y arriver. Et pour finir Baudouin rocks.
Halte-là, voyageur ! Dis-nous donc qui est ton maître, et les raisons qui t’ont poussé à lui prêter allégeance ! Est-ce par conviction, par intérêt, par obligation ? Certains diraient que mon maître est Thierry d’Alsace, mais cela serait une lourde erreur. Voisins nous sommes par la force des choses, et ennemis nous sommes par choix. Si le comte de Flandres souhaite me voir lui prêter allégeance, mieux vaudrait pour lui prier que le tombeau du Christ soit enfin délivré, son vœu serait plus sûr d’être exaucé! Mon allégeance politique est envers l'Empereur germanique, mais je ne peux cacher que l'éloignement géographique, la puissance de ma famille et les conflits politiques m'ont largement poussé à ne plus respecter cet engagement. Ma lignée, depuis de nombreuses années, puise son pouvoir en ses vassaux et ses fiefs, le Hainaut en est ainsi fortifié, et les aléas de l'Empereur sont à mes yeux une goutte d'eau dans la mer germanique. Les frontières françaises bordent mes fiefs, et pour multiplier mes chances de rallier enfin Flandres et Hainaut, j'ai ainsi décidé de me suis tourner vers la France, comme mon père auparavant, malgré la rancoeur tenace que je ressens pour le feu-roi Louis VI puis son fils. Cette allégeance est une obligation si je souhaite obtenir des faveurs qui ont été accordées de longues années auparavant, lorsque le conflit qui opposa la Flandres et le Hainaut s’embrasa. Philippe 1er nous avait assuré de son soutien, mais l’avenir le trahi, poussant les rois qui lui succédèrent à assurer à mes cousins la survivance d’un comté qui, de droit, se doit de revenir dans le giron de ma famille.
Je ne puis changer mes allégeances, sinon obtenir des alliés afin de faire pencher le poids de la balance en ma faveur, s’il devait arriver un malheur à Thierry d’Alsace. Rester auprès du roi de France est une décision à ne pas remettre en cause pour l'heure.
Si une guerre venait à éclater entre l’Aquitaine, la France, la Normandie et l’Angleterre, que ferais-tu ? Prendrais-tu part au combat ? De quel côté ? Ou bien resterais-tu à l’écart ? Mon allégeance me pousserait à soutenir le roi de France, quêter auprès de lui une honnête récompense pour les services rendus en des temps douloureux. Servir les Anglais ou les Normands? L’idée est inconcevable! Ces deux patries ont piétinés mon héritage, ont imposé leur comte sur les Flandres, que seule la Mort a su délivrer. Guillaume Cliton, fier descendant de Guillaume le Conquérent! L’idée est opposable, et je préférerais mettre mon épée au service de l’Aquitaine si celle-ci pouvait par la suite m’assurer de son soutien. Chaque alliance m’est importante, chaque décision en temps de guerre pourrait me permettre de déplacer un pion. Même si mon âme et mon esprit se refusent à rejoindre Normands ou Anglais, Français et Aquitains pourront espérer me voir rejoindre leurs rangs s’il le fallait. Lorsque politique et guerre se mêle, il est nécessaire de choisir son camp selon les alliances à venir.
Pourtant, je reste bien chauvin et si l’occasion m’en est donnée, je préférerais épargner à mes hommes une guerre externe au Hainaut, si celle-ci ne les concerne pas. Nous avons chacun nos douleurs, nos souffrances, exposer les Hennuyers à un conflit qui ne les touche pas serait perdre inutilement de vaillants soldats, prêts à se battre pour défendre les couleurs de leur suzerain.
Toutes ces alliances, ces mariages… Qu’en penses-tu ? Servent-ils tes intérêts ? Ou chercherais-tu à les rompre? Comte à douze ans, j’ai su très jeune ce que signifiais la politique et l’intérêt des alliances. régente, ma mère s’est efforcée de m’inculquer ce sens du devoir et j’ai très vite appris combien importaient ces liens et ces rapports. Non seulement dans mes intérêts personnels, mais également pour ceux de ma famille. Le Hainaut, vaste province prise entre deux puissants royaume, se doit de prospérer et de s’agrandir et si je peux éviter d’exposer mon peuple à d’autres guerres que celle qui ravage les Flandres et le Hainaut, je préférerai passer des accords. Le mariage fut pour moi un contrat de plus, et la Providence récompensa mon abnégation face à cette situation, en me confiant une épouse dévouée, honnête et aimante. Fort de cette expérience, je sais que mes filles serviront un jour à conclure ces alliances. Rien, dans leur éducation, n’a éludé cette possibilité. Je n’espère à ce jour qu’une chose: que mes deux fils, encore jeunes, puissent à l’avenir poursuivre cette politique.
Enfin, dis-nous un peu : plutôt bal ou plutôt tournoi ? Plutôt guerre ou plutôt paix ? Plutôt amour courtois ou plutôt croisade ? Quelles questions! En me voyant, vous choisirez certainement tournoi, guerre et croisade, mais pourtant, mon éducation me fit apprécier de nombreuses facettes de la politique, et le bal n’en n’est pas exclu. Non pas que je préfère la danse à la guerre, mais ces hauts lieux de rencontres restent pour moi le moyen d’exposer les richesses du Hainaut, de retrouver alliés ou amis, de me rendre compte par moi-même de ce qui anime la cour du roi de France. S’adapter à un nouvel environnement est primordial et ceci reste entre nous, mais je ne m’y rends rarement à reculons! Si la guerre dévaste mon pays, c’est que le sens de la justice est chez les Hainaut une valeur transmise depuis mon grand-père. Dépossédé de ses terres, il eu préféré la paix afin de reprendre son héritage, mais c’est le conflit sanglant qui a éclos dans cette lutte pour le comté de Flandres. La mort a assez jonché les terres de Flandres et du Hainaut, et malgré mon désir de poursuivre encore ce combat pour obtenir justice, je ne souhaite que mes armées s’amenuisent à nouveau dans un conflit qui ne les concerneraient pas. Guide d’un vaste comté, mes yeux se porte d’abord sur mes terres plutôt qu’à l’extérieur. La paix défend des frontières, mais la guerre dévoile la puissance de forces opposées. Chevalier, je ne puis préférer l’un à l’autre. Amour courtois? Croisade? Loin des agitations de la cour du roi de France ou des cours avoisinantes, l’amour courtois n’a été ici qu’illusion passagère. Mon épouse n’avait que 15 ans, j’en atteignais à peine 19, qu’attendre donc, lorsque l’on est déjà unis par des liens politiques? Alix n’est en rien de ces jeunes femmes se baignant dans l’amour courtois dont les principes échappent encore à l’homme de guerre que je suis, et que Dieu préserve ma fille Laurence d’y tomber! Croisade? Je le serais, si mon devoir ne m’appelait à œuvrer pour la terre qui m’a été transmise. Rien n’est plus important à mes yeux que cet héritage familial, et si l’honneur de chevaliers se forgent lors des croisades, je préfère laisser l’orgueil guider mes choix.
Il était une fois, il y a fort longtemps...
22 février 1071 - Bavinchove
L’herbe verte baignait dans le sang rouge vif, alors que le soleil baissait ses rayons glacés. La brume envahissait le champ de bataille, enveloppant de ses bras le dernier sommeil des soldats tombés. La rosée tombait lentement aux pieds du Mont Cassel, et l’on pouvait au loin apercevoir les silhouettes courbées quitter la plaine assombrie. Les bannières du roi de France s’éloignaient, quittant la terre ensanglantée, livrée à l’ambition et à la colère des hommes. Les corps sans vie reposaient sur l’herbe, attendant d’être emportés par les charrettes sur lesquelles s’entassaient les cadavres de leurs compatriotes. Alors que l’on comptait les morts, quelques prêtres, penchés vers la terre, bénissaient les âmes parties trop tôt.
-Combien de temps encore cela durera-t-il ? Assis sur une chaise bien trop haute pour lui, les bras lâchés sur les accoudoirs, le jeune comte de Hainaut, Baudouin, avait pris sa tête dans ses mains, retenant des larmes qu’il ne voulait laisser couler. -Messire, retirez-vous sur vos terres, faites allégeance à votre oncle. Ne tentez rien pour le moment, cela serait pure folie.
Le jeune garçon de 15 ans leva un regard humide vers ce conseiller, avant de lâcher un long soupir à fendre chaque pierre du donjon qui l’abritait. -Mon frère vient d’être tué, ma mère faite prisonnière, que croyez-vous qu’il me reste à faire, répondit-il amèrement en replongeant ses yeux vers le sol ? Combattre celui qui a jugé bon de nous défendre contre notre mère, mon frère et moi ? Mon oncle Robert a cette défense pour lui, reprit-il douloureusement. Si ma mère avait agit selon les désirs de notre père, si mon oncle avait accepté cet état de fait, il n'aurait pas cherché à reprendre les Flandres, il n'aurait pas rallié la population à son bord, évinçant mon frère…puis moi...
Il se tut, les mots étant inutiles pour exprimer la douleur qui broyait son cœur en cet instant. A ses yeux de jeune adulte, cette guerre n’était qu’illégitime, lui ôtant dans le sang et la violence ce qui lui revenait de droit. -Lorsque vous serez adoubé, lorsque vous aurez manié les armes, vous reprendrez les Flandres, messire. Elles vous appartiennent. L’adolescent hocha sombrement la tête. -Cette guerre durera tant que le Hainaut et les Flandres ne seront liées entre elles, lorsque l’injustice qui me frappe et frappera ma descendance ne sera réparée, fit-il entre ses dents. -Ne soyez pas si pessimiste, le roi de France soutient votre mère. Elle poursuivra cette tâche pour vous. -Celle qui a ravagé les Flandres et anéanti le testament de feu mon père, reprit Baudouin d’une voix enflammée ? Je n’ai hélas qu’elle à ce jour pour défendre mes intérêts, n’est-ce pas ? Choisir entre le choléra ou la peste. Entre celle qui a usurpé la tutelle de mon oncle prévue dans un testament, ou celui qui s'octroie nos terres pour la punir! Le vassal du jeune comte hocha silencieusement la tête en signe d’assentiment.
Baudouin se tu, ne voulant laisser exprimer une seule de ses pensées. Négatif, il savait par avance que les Flandres soutiendraient son oncle au détriment de sa mère et de lui-même. Comte de Hainaut, il resterait à jamais le comte de Flandres de quelques douloureuses heures.
LE temps de l'enfance et de la régence
Mons, 1120
-Le dernier de sa lignée, mère. -Le dernier de sa lignée, jusqu’à présent, Baudouin.
La femme passa une main dans les cheveux clairs de son fils de douze ans avant de le pousser silencieusement vers le cœur de l’église. Au pied de l’autel, vêtu de ses plus beaux atours, plus beau encore qu’il avait pu le voir auparavant, son père semblait se reposer de l’éternel sommeil. Les yeux paisiblement clos, les lèvres fermées, il n’avait plus ce visage du père ferme et déterminé qu’il avait connu. Ce père qui avait su lui montrer de la douceur lorsqu’il n’était encore qu’enfant, et qui lui avait donné ses premières armes lorsqu’il fut en âge d’en manier. Cette imposante figure, ce guerrier, ce héros à ses yeux d’enfant était bien trop calme pour que Baudouin ne pu le regarder plus longtemps sans ressentir une immense douleur lui fendre le cœur. Il détourna les yeux du cadavre exposé sous la lueur des cierges, rejoignant ses frères et sœurs, avant de se plonger dans une silencieuse prière.
Plus que la disparition d’un être cher, il savait ce que cet accident de chasse venait de provoquer et à douze ans, il se sentait bien trop faible pour supporter le poids d’une charge dont son père l’avait déjà longuement entretenu. A lui, le comté de Hainaut. Ses terres, ses fiefs, ses charges. Vassal du roi de France, suzerain du Hainaut, protecteur des villes, des villages avoisinants, du peuple qui croyait dès à présent en lui. A lui, la guerre contre Charles de Flandres, afin de poursuivre une lutte qui ne trouvait de repos. Les mains si jointes que ses doigts en blanchirent, Baudouin ne put confier qu’à Dieu toutes les craintes de cet avenir déjà sombre, essuyant brièvement une larme d’un fils orphelin.
-Je t’épaulerai, mon cher fils, n’aie crainte, lui susurra Yolande de Wassemberg à l’oreille lorsqu’elle le rejoignit. Il senti sur son épaule la main rassurante de sa mère, à laquelle il ne pu répondre que par un bref hochement de tête. Je te donnerai tout ce qu’il me sera possible de te donner pour que tu sois le plus grands des comtes que le Hainaut n’aie eu. Relevant la tête, le jeune garçon eu un mince sourire devant la promesse de sa mère. -C’est impossible, mère. Il y a déjà eu tous mes ancêtres avant moi, répondit-il d’une voix lasse avant de se replonger dans ses funèbres prières.
Ce fut pourtant ce que s’efforça de faire la comtesse de Hainaut, régente pour son fils aîné. Plus raisonnable que Richilde de longues années auparavant, elle avait depuis longtemps pris le parti de son défunt époux, lui promettant de tracer pour leur fils aîné un chemin dégagé vers les responsabilités qui l’attendaient. Yolande de Hainaut, prudente, avait assuré à Charles de Flandres son intention de faire une trêve dans la guerre civile qui déchirait le pays depuis la mort de Baudouin II de Hainaut, grand-père de son aîné. Mais elle n’avait pu lui assurer que son fils s’attacherait à cette paix momentanée ; elle le refusait plus qu’elle n’en n’était incapable. Indéfectible soutien auprès de son époux, elle espérait au fond d’elle que son fils aîné hériterait des gènes de ses ancêtres, qu’il réclamerait son dû, qu’il reprendrait les armes lorsqu’il le pourrait, qu’il serait prêt à enflammer de nouveau les Flandres pour asseoir sa légitimité face à ces usurpateurs. Cousins, certes, mais indésirables.
Femme cultivée et raisonnable, elle se refusa à mener son fils trop jeune, encore malléable, vers ce terrain glissant et ô combien dangereux. Elle connaissait assez ce caractère rebelle pour savoir qu’à 13 ans, il préférerait repousser une proposition trop claire de sa mère, afin de trouver la solution par lui-même. Plus sournoise, elle préféra ainsi lui inculquer les valeurs d’une ancestrale famille, lui apprendre l’honneur et la parole d’un chevalier. Elle le confia aux mains des hommes les plus éclairés, ceux qui, des terres d’Orient, rapportaient des Croisades le savoir des mahométans ou ceux qui avaient brillé aux côtés de son époux trop tôt disparu. Insidieusement, elle insufflait à ce jeune esprit tout ce qui avait animé son père et ses aïeux avant lui et sous ses yeux de mère satisfaite, elle vit cet enfant débrouillard et revenchard se muer en un jeune homme fier et ambitieux.
Eloigné de la présence de ses cadets pour le préparer à son rôle, Baudouin se plongea dans une instruction qui pouvait seule le défaire du manque de confiance qui le poussait alors à de longs moments de crainte et d’hésitation. Il s’inquiétait de la tournure de cette relative paix avec les Flandres, de ce que pourrait tenter Charles de Flandres lors de cette régence, de ce qu’il devrait accomplir pour servir ses intérêt. L’angoisse le rongeait aux premières heures de l’adolescence, alors qu’il redoutait de n’être pas à la hauteur des espérances paternelles. Il sentait constamment sur lui plus que le regard d’une mère, celui d’une régente attentive. Si les exercices du corps le formaient à de futurs combats, ceux de l’esprit exerçaient des talents de diplomate, poussés par une prodigieuse mémoire. Enfant belliqueux, cherchant sans cesse son cadet pour de mémorables combats d’épées de bois, aux colères bouillantes et au caractère plus têtu que celui que l’on disait des bretons, Baudouin devint pourtant un adolescent consciencieux, travailleur assidu, élève brillant, se plongeant dans l’étude autant que dans l’art des armes. Il savait se taire, écouter, apprendre avec sérieux.
Mais jusqu’à la majorité de son fils et encore après, Yolande craignait la réserve de son fils. Silencieux au travail, elle n’avait jamais su percer ses pensées, afin de mieux sonder le cœur de cet aîné qui se devait de porter haut les couleurs de ses terres. Elle redoutait qu’à l’instar de Pierre envers le Christ, Baudouin ne renie le combat de ses ancêtres en abandonnant les Flandres. Combien de fois l’avait-il faite taire alors qu’elle le ramenait vers ces desseins familiaux ? Trop de fois. A chaque mot plus haut qu’elle lançait plus haut que l’autre, il se murait dans un silence qu’elle ne pouvait lever. Un orgueil en blessait un autre, et elle savait combien le père et le fils se ressemblaient sur ce point. Plus son fils grandirait, moins il lui laisserait de pouvoir entre les mains. Baudouin, dès la disparition de son père, avait accepté, bien que douloureusement, le poids de cette responsabilité. Yolande n’était que régente et il savait le lui rappeler.
Son cœur de mère la poussait à le laisser libre, mais sa raison de comtesse ne pouvait la faire accepter ce silence qu’il lui imposait. Elle ne pouvait, tant qu’elle en avait encore la possibilité par son statut de régente et de mère, que guider son fils vers un chemin assez étroit pour qu’il ne puisse aisément s’en dégager. Cette route avait préalablement été tracée par son époux, elle ne fit qu’appliquer l’héritage qu’il lui avait laissé. La manipulation était pour elle la nécessité que lui imposait sa naturelle prudence.
***
1125
-C’est totalement sournois, mère, soupira Baudouin, assis au bout de la table du conseil, alors que Yolande marchait de long en large derrière lui. -C’est de la politique ! Il balayait l’air de la main, l’œil sombre, prêt à lâcher ce qu’il pensait de cette politique-là, ou du moins, la manière dont elle se faisait. -Je connais la politique, mère, j’aurais préféré en être informé plus tôt, étudier d’autres possibilités ! -Tu es encore jeune, et… -Je suis assez capable, mère, s’exclama Baudouin en repoussant son siège pour lui faire face ! Je suis bientôt majeur, vous semblez l’oublier trop rapidement ! Vous n’êtes que régente, JE suis le comte du Hainaut ! Face à ce visage qu’elle n’avait pas connu depuis longtemps chez son fils, Yolande se raidit, non sans ressentir une pointe de fierté en observant la lueur farouche luire dans les prunelles de Baudouin. Son sentiment se mêlait d’une crainte de se voir bientôt reléguée à un second plan et la satisfaction de voir resurgir le caractère belliqueux de son fils. Elle retint un sourire et détourna le regard, rompant le silencieux duel. -Alix de Namur apportera ce comté à ton apanage, il agrandira tes terres. -Et un appui pour les Flandres, termina le jeune homme en tournant ostensiblement le dos à sa mère ? -Pourquoi pas, fit-elle en entrant dans le jeu de son fils. Approuve ce traité, aucune alliance ne peut être plus bénéfique actuellement. -Alors pourquoi ne pas attendre, demanda-t-il pour repousser sa mère dans ses retranchements ? Un parti plus avantageux pourrait se dessiner plus tard. Il se retourna vers elle et tous deux, un instant, se jaugèrent en silence. Plus tard, pour Yolande, signifiait la majorité de son fils, son éviction prématurée du pouvoir avant qu’elle n’aie accompli tout ce qu’elle souhaitait rendre à Baudouin. -As-tu bien étudié le portrait qui nous a été transmis, répondit-elle dans un sourire pour couper court à la brève colère du jeune comte ? C’est une jeune fille des plus instruites, on la dit fort belle et… -Donnez-moi ce traité, la coupa-t-il d’un geste impatient en saisissant les documents posés sur la table. S’il ne me convient pas, nous étudierons d’autres possibilités. -Il a été longuement négocié, Baudouin. Fais-moi confiance une dernière fois, avant que tu ne sois libre de toute décision. Son fils ne répondit rien, plongé dans la lecture des parchemins, dont, au fil de la lecture, il retenait chaque terme avec précision.
Les années et les études avaient depuis longtemps ouvert les yeux du jeune comte. S’il s’était assagi en apparence, sa facette réservée cachait en réalité son caractère belliqueux et impatient de prendre les rênes du pouvoir. Durant ces longues années sous la tutelle de sa mère, il avait accepté la naturelle soumission que lui imposait son jeune âge, mais au fil des ans, il avait acquis en maturité et en assurance, et attendait l’âge qui le libérerait du joug de la régence. Il avait observé, silencieusement appris et retenu chaque détail qui pouvait le servir à l’avenir. Sa prodigieuse mémoire le servait chaque jour, alors qu’il se rendait compte de l’emprise de sa mère sur lui. Il l’aimait, mais il se défiait de la femme politique qu’elle était devenue. On pouvait sans doute possible voir en lui le digne descendant de ses aïeux, mais il avait choisi de créer la surprise, déroutant ceux qui n’avaient su percer cette apparente carapace de sagesse. Les Flandres? Eternel combat, il escomptait le mener à son terme, que ce fut-ce dans la paix ou dans le sang. S’il possédait toutes les qualités qui faisaient de lui un parfait chevalier, il n’en n’était pas moins un téméraire guerrier qui attendait de pouvoir enfin réclamer ce qui lui revenait de droit.
Nul n’avait exagéré les qualités de la jeune Alix de Namur, qu’il découvrit le jour de leurs noces. Le traité, signé par les deux parties, avaient assuré à la jeune femme toutes ses prétentions sur le comté de Namur, pour elle et sa descendance. Les fiançailles conclurent les signatures apposées, et le mariage scella l’accord des nouveaux alliés. Lorsque l’évêque de Liège lia les deux jeunes gens, le sourire de Yolande de Wassemberg était bien plus éclatant que celui des jeunes époux. Elle pouvait à présent se retirer, à ses yeux, elle avait fait tout ce qui était nécessaire pour assurer à son fils un avenir brillant. Avant qu’il ne l’éloigne, elle faisait le choix de partir elle-même.
Les temps du pouvoir et des conquêtes
1127 - Château de Mons
-Poussez-vous! Pardon! Dégagez! Pardon! Laissez-moi passer! Le jeune page courait sur le pont-levis, évitant marchands et gamins qui lui barraient le passage, poursuivi sa course dans la course du château, bientôt rejoint par des chiens errants qui tentaient de lui attraper les mollets. -Où vas-tu gamin, s’écria le premier garde qui brandit sa hallebarde à la porte du donjon? -Je suis le page du comte! Je dois le voir! Tout de suite! L’homme regarda son camarade et éclata d’un grand rire. -Ca n’est pas le moment, il est en conseil, tu lui parleras plus tard. -C’est urgent! Laissez-moi passer, s’exclama le gamin essoufflé, implorant! J’apporte des nouvelles de Flandres! Les soldats se jetèrent un regard inquisiteur, jaugèrent le gosse avant de relever leurs hallebardes. -File petit, et si tu nous as trompé, ça sera au comte de s’occuper de toi. Ils lui lancèrent un sourire goguenard alors que le page atteignait déjà le bout de la galerie menant au donjon principal.
En haut de l’escalier, il parvint à se faufiler entre les gardes barrant la porte menant à la salle du conseil, mais l’un d’eux l’attrapa au collet avant qu’il ne puisse ouvrir la porte. -Eh mon gaillard! Revint-là! Qui t’a autorisé?! -Je dois voir le comte, se débattit le page en cherchant à se dégager de la puissante main du soldat. -Ne vois-tu pas qu’il est occupé par d’autres affaires que celle de son cheval? Un rire moqueur ponctua ses paroles. -Dégage de là, gamin. -J’apporte des nouvelles de Flandres, tenta-t-il! -Et moi de Normandie, ah-ah! Dégage, reprit le garde d‘une voix féroce. Sans se démonter face au regard de loup du garde, le page pris sa respiration et tenta sa dernière chance, espérant que sa voix porterait au-delà de l’épaisse porte de chêne. -LE COMTE DE FLANDRES EST MORT! ASSASSINE! -Tais-toi, punaise, grogna le garde en tentant de l’étouffer! -MORT PENDANT LA MESSE, tenta de nouveau bravement le page alors que le garde l’empoignait pour le balancer dans l’escalier!
Le page voyait déjà sa tête rouler sur les marches lorsqu’il entendit la porte s’ouvrir à la volée et la voix puissante du comte stopper le soldat. -Faites entrer cet enfant au lieu de lui fracasser la tête! C’est moi qui l’ai envoyé à Bruges avec son père. La mine sombre d’avoir été arrêté en pleine réjouissance, le garde reprit le gamin par le bras pour le pousser vivement dans la salle du conseil, dont les portes se refermèrent aussitôt. Intimidé par les visages qui se tournèrent vers lui, le page resta immobile, face au comte qui s’état rassis au bout de la table sur laquelle s’étalait cartes et parchemins.
-Avance, lui fit-il doucement en reconnaissant Olivier, ce page aussi fidèle qu’un chiot envers son maître. Qu’as-tu crié, tout à l’heure, lui demanda-t-il alors que le marmot s’avançait timidement, essuyant ses doigts sales sur sa culotte. Que s’est-il passé en Flandres? -Le bruit est sûr, messire. Le comte Charles a été tué en pleine messe! Un murmure d’indignation s’éleva dans la pièce. -Croyez-bien que je n’y suis pour rien, fit Baudouin d’une voix forte. Continue, petit. -Dans la cathédrale de Bruges, hier. Nous sommes partis aussitôt pour Mons.
Baudouin se renfonça dans son fauteuil, songeur. Il n’avait eu ce pouvoir entre ses mains que depuis quelques semaines à peine, et déjà se profilait à l’horizon la tentation suprême. Le trône du comté était vide. Libre, attendant que son digne héritier s’y asseye enfin, réunissant Flandres et Hainaut sous sa coupe. Silencieux, cible des regards inquisiteurs de ses conseillers, il n’eu pas à chercher bien longtemps dans sa mémoire afin de trouver les noms de ses futurs ennemis à cette course au comté. Lorsqu’il releva les yeux, il n’avait plus rien de ce jeune comte encore gauche, incertain sur ses décisions à prendre.
-Nous avons contre nous les descendants de mon aïeul. Sa fille Mathilde, reine d’Angleterre, a laissé de nombreux enfants, dont le roi Henri. Trois fils, précisa-t-il, trois fils qui pourront prétendre au comté, car je doute que chacun d’eux accepte que les Flandres reviennent à leur légitime héritier, fit-il amèrement. Je ne parle pas de Thierry d’Alsace, certainement prêt à prendre sa part du butin. -Quelles solutions proposeriez-vous? -Je serais tenté par répondre “une paix”, mais nous avons là des parties, dont certaines d’entre elle sont tenues par des lions. -Henri Beauclerc ne laissera pas passer cette chance de prendre possession d’un tel territoire. Il a déjà montré que les liens du sang ne valaient pas grand chose à ses désirs de puissance. -Son neveu, Guillaume Cliton, peut se révéler un adversaire de taille. -Il a été élevé près de mon oncle, précisa Baudouin, la mine songeuse.
Face à ces têtes pensantes, Olivier se tassa sur lui-même, regagnant petit à petit la porte en glissant silencieusement ses pieds sur le sol. Avec un peu de chance, ils l’avaient tous oublié et il pourrait repartir! Il retint lentement sa respiration, se portant lentement à reculons vers la porte tout en observant les adultes avant qu’ils ne le repèrent. Mais à l’instant où il touchait du doigt la porte close, la voix du jeune comte l’interpela. -Olivier, viens par ici. Le gamin s’exécuta promptement, les joues en feu. Sais-tu qui a commis ce blasphème contre mon cousin? -Euh...le page hésita à colporter les rumeurs entendues à Bruges. Eh bien on dit que….vous en seriez le commanditaire. -Foutaises! Qu’as-tu entendu d’autre de moins idiot? -On aurait arrêté un groupe d’hommes qui avaient des agitateurs. -Des ennemis du comte, le sais-tu? -Je crois avoir entendu ça, oui. Des hommes mécontents, peut-être. -Merci Olivier. File à présent, je me souviendrai de ton aide, mais toi, pas un mot sur cette affaire tant que je ne l’aurai annoncé. -Bien messire, fit prestement le gamin avant de s’enfuir sans demander son reste!
-N’attendons pas que les autres parties réagissent, reprit Baudouin. Henri Beauclerc ne cherchera pas la paix avec nous, pas plus, je le crains, que Thierry d’Alsace ou que Guillaume de Normandie. -Préparerons-nous une paix? -Pour la paix, il faut la guerre, messieurs, asséna Baudouin en repoussant son fauteuil. Je veux connaître demain le nombre exact d’hommes en âge de combattre. Je ne prendrai aucune décision sans savoir si nous pourrons supporter une nouvelle guerre.
1127 - Audenarde, Flandres
L’étalon piaffaient d’impatience et entre les mains fermes de son cavalier, rongeait son mors sans parvenir à lui échapper. Il entendait le bruit des sabots à ses côtés, la terre trembler sous le choc des fers, les épées s’entrechoquer au loin, dans la plaine d’Alost. Henissant de colère d’être ainsi attaché, il se cabra avant de sentir en ses flancs les éperons de son cavalier. Il le sentait sur son dos, impassible, immobile, et l’instinct animal lui fit comprendre que bientôt, il pourrait à son tour s’élancer. Il secoua son épaisse crinière brune, hennit de nouveau, tenta de prendre la main de son maître, mais celui-ci se pencha sur le côté. -Doucement, c’est bientôt à toi. La première charge a été donnée. Tiens-toi prêt. La voix encore jeune mais ferme du cavalier rassura l’étalon qui se calma un moment, avant de s’énerver à nouveau. L’herbe s’étalait sous ses yeux, mais déjà piétinée par les hommes armés et les chevaux. Alors qu’il piaffait de nouveau, il entendit le bruit distinct du fer et sentit les jambes de son maître presser ses flancs, sa bouche se libérer de la pression humaine, ses jarrets puissants le projeter au loin.
Les bruits de ses sabots résonnaient dans ses oreilles, le vent fouettait ses naseaux brûlants alors que, sans discontinuer, son cavalier le poussait toujours plus en avant, vers l’immense terrain d’où jaillissait déjà le sang. Les corps à terre stoppèrent sa course, le mors se tendit à nouveau, mais sans songer à se sauver, n’épargnant aucune douleur, il piétina les hommes à terre, poussé sur les flancs, tentant d’échapper aux lames acérées. Son lourd caparaçon le protégeait autant qu’il l’empêchait de se dégager de l’ennemi qui s’agitait autour de lui, mais il voyait la longue épée de son cavalier briller lorsqu’elle croisait les rayons du soleil, baignée de lumière et de sang. Les cris bourdonnaient dans ses oreilles, les hurlements de douleur l’apeuraient et écrasant membres ou visages, l’étalon ne cherchait qu’à fuir, qu’à protéger son cavalier des menaces qu’il aperçevait. Sa bouche tiraillée par le fer du mors se tordait avec violence alors qu’il poussait un hennissement de colère. Il sentait sur lui le liquide chaud se répandre sur son encolure, sa crinière s’emmêlait alors que ses sabots piétinaient sol et hommes. Un coup d’éperon de son maître le poussait parfois plus loin, et lancé au galop, il quitta le champs de bataille rougeoyant.
Les portes de la ville se dressaient devant lui, béantes et ouvertes sur les rues vides, mais il sentait la présence d’hommes dans les maisons aux volets clos. La peur régnait dans la ville, une peur si forte que l’étalon ne se rassura que par la présence de la main de son maître, par sa voix calme qu’il entendait parfois. Marchant prudemment dans la ville, il guettait le moindre mouvement, tressaillant de tous ses muscles à chaque bruit inconnu. Son cavalier le stoppa un instant et dans l’ombre projetée au sol, l’étalon ne vit qu’une main se tendre, avant de sentir près de lui la chaleur d’une flamme. Les rênes se tendirent sous les doigts fermes, il du pivoter sous la pression de son cavalier, revoyant les portes ouvertes, l’armée sanglantes d’ombres vivantes se projeter, torches à la main. Les flammes dansaient devant ses yeux et la main chaude de son maître le rassura enfin. -Doux, entendit-il murmurer, alors que les doigts glissèrent le long de l’encolure. Il se tourna à nouveau vers la ville, avança de quelques mètres avant que des bruits de bottes ne le firent se retourner, pour découvrir des armures sombres, porteuses des flambeaux.
-Audenarde est perdue pour le Hainaut, qu’elle soit perdue pour les Flandres, murmura le maître avant de lancer la torche sur le toit de chaume d’une habitation. Nous vous avons prévenus! L’usurpateur apporte guerre, larmes et douleurs. Vous aviez le temps de sauver vos enfants, vos femmes et vos biens! Il est trop tard pour fuir si vous ne l’avez fait. Que votre seigneur, le comte de Flandres, soit récompensé de son titre, ajouta amèrement le cavalier, avant d’enfoncer ses talons dans les flancs de l’étalon qui galopa pour se sauver de la ville en flammes. Derrière lui, montaient les cris des habitants qui n’avaient tenu compte des avertissements mais dans sa crainte, l’étalon ne prit aucune seconde pour stopper sa galopade et retourner en arrière. Son cavalier l’éloignait du danger.
-Vous avez incendié une ville! Imaginez le nombre d’enfants, de femmes qui ont péri dans les flammes! Seigneur! Alix de Namur, pâle et tremblante, se laissa tomber en larmes dans son fauteuil, sous le regard de son époux. La bataille pour garder Audenarde avait été plus féroce lorsqu’il s’était rendu compte qu’il ne pouvait garder Alost. La tentative avait été désespérée, peut-être due à son inexpérience, ou à cet orgueil qui l’avait poussé si rapidement contre le favori du roi de France. Face à tous ses adversaires, Guillaume Cliton avait été nommé comte de Flandres, provoquant l’une des plus terribles colères de Baudouin. Il avait durement fait payer le nouveau comte en envahissant le pays d’Alost, et quelques mois plus tard, il retirait ses troupes épuisées, enflammant la ville, laissant derrière lui ses soldats dont il ne voulait entendre les exactions. Malgré son jeune âge, il savait combien il était difficile de tenir une telle armée...mais il n’avait pas non plus su combien il était malaisé de subir le regard douloureux de sa jeune épouse.
Son armure à peine retirée, encore poussiéreux de la bataille, le visage brillant sous la sueur de son heaume, il n’osa poser sur elle une main rassurante et l’oeil noir qu’elle lui montra lorsqu’elle releva la tête lui fit comprendre qu’aucune parole ne l’appaiserait. -Faites ces guerres si vous le souhaitez, tuez des soldats qui se battent pour cela si vous le souhaitez, mais, par la Sainte Vierge, plus de femmes ni d’enfants, plus de villes pillées ou incendiées. Ne me faites pas subir ces douleurs une fois de plus. Assiégez des villes, incendiez des campagnes, mais épargnez les innocents…..épargnez-les de vos conquêtes.
Baudouin connaissait le prix d’une promesse. Cette guerre, il l’avait souhaitée et préparée, il savait quelles en seraient les victimes, et jurer de protéger les populations étaient une parole difficile à donner. -Je ferais ce qu’il sera possible de faire, je vous le promets, se contenta-t-il d’assurer à son épouse. Mais je ne peux vous promettre de laisser aucune ville intacte, aucune victime de mes soldats. -Alors cessez la guerre. -Que feriez-vous si Namur vous était prise de force? La jeune femme lâcha un long soupir, ne pouvant dire à haute voix ce que son mari savait d’avance. Elle compris que tant que la fougue de l’orgueil les porteraient, ni Baudouin ni aucun de ses ennemis ne chercheraient une paix durable.
Le temps du deuil et de la paix
En ouvrant un livre d’Histoire, l’on ne peut comprendre quels furent les motifs, en 1147, qui poussèrent le brillant comte de Hainaut à reprendre un combat au crépuscule d’une vingtaine d’années de paix relative. De nombreuses sources citeraient le départ en Croisades de Thierry d’Alsace, comte de Flandres dès 1128, comme occasion à saisir, mais la réduction serait bien trop simple, et l’erreur nous pousserait à ne voir en Baudouin qu’un homme aussi sournois que le fut sa mère auparavant.
La déroute d’Audenarde à cet âge si jeune et à l’orée de longues années au pouvoir lui avait fait prendre conscience de l’inutilité d’un combat poussé par la colère. Ses hommes avaient subit de lourdes pertes, ses vassaux remettaient en cause l’assurance de leur si jeune seigneur et au fil des semaines qui suivirent l’incendie de la ville, il sentit qu’il se devait de gagner la confiance de turbulents vassaux avant de reprendre une guerre coûteuse en hommes et en argent. S’il avait éloigné sa mère du pouvoir, Yolande de Wassemberg n’en n’était pas moins indéfectiblement attachée à son fils et craignant de nouvelles humeurs de Baudouin à son encontre, elle préféra se tourner vers sa bru, adorable adolescente dont l’intelligence, encore timide, n’en n’était pas moins brillante.
Alix avait hérité de son père sa détermination et un sens inné de la politique. Fille aînée d’une seconde union, elle avait très tôt compris les enjeux d’un mariage et s’était résolue de longue date à devenir une parfaite épouse pour l’homme que lui donnerait son père. Froide et raisonnable, elle était d’un abord pondéré qui ne pu que plaire à l’envoyé de Yolande de Wassemberg lors des négociations du traité des fiançailles. Elle avait longuement questionné les maîtres de son frère - et futur comte de Namur - afin de mieux connaître ce que l’on attendait d’une parfaite épouse; elle avait retenu le conflit qui l’opposait à la Flandres, avait appris un peu plus son caractère en ne tarissant pas d’interrogations auprès du messager hennuyer, jusqu’à lui en faire perdre patience. Du haut de ses 14 ans, Alix présentait bien plus de maturité que l’on pouvait espérer, et avait accepté cette alliance, bien avant de rencontrer son futur époux. Ses petites enquêtes la servirent lors des premiers mois de leur union, et malgré la personnalité déroutante de Baudouin qui passait d’humeur gaie à ombrageuse, elle se tint silencieuse, observatrice et attentive, s’efforçant d’être celle que son père lui avait dit de devenir: une épouse dévouée.
Ce mot avait sur elle une tout autre signification que ce qu’entendait Baudouin. Aux yeux du jeune homme, “dévouée” n’était qu’un terme enjôlivant un caractère effacée et enchaînant tout désir de rebellion. Pour Alix, il s’agissait d’appuyer son époux, de le guider s’il devait s’éloigner du chemin qui pouvait agrandir un peu plus les prétentions du comté de Hainaut. Pour cela, nul charme ou séduction, car son caractère dynamique, doux et aimable suffit à rompre les quelques barrières naturellement dressées entre eux. Baudouin s’intéressa à Alix dès que la déroute d’Audenarde lui montra toute la difficulté de son entreprise. La réelle compassion de la jeune femme à l’égard de la population avait atteint son coeur encore jeune et presque embarrassé de l’avoir ainsi déçu, il s’efforça de revenir à un terrain plus sage, et d’user de diplomatie avec son nouvel ennemi flamand, son cousin Thierry d’Alsace.
Les révoltes flamandes lors de la succession de Charles de Flandres les avaient liées par la force des choses. Opposés à Guillaume Cliton - désavoué par la Flandres - leurs armées avaient combattu côte à côte, avant de se trouver à nouveau ennemies lorsque Guillaume fut battu et que Henri d’Angleterre envoya ses armées secourir Thierry d’Alsace. Le conflit avait duré après Audenarde, mais pansant les plaies de ses armées, Baudouin avait laissé Thierry d’Alsace reprendre les Flandres. Quelques dernières révoltes hennuyères furent écrasées, renvoyant le jeune comte à Mons, accepter la lourde défaite.
Plus sage que son prédécesseur, Thierry d’Alsace poussa Baudouin a accepter une trêve. Les croisades, croira-t-on longtemps, eurent de bénéfiques effets et de part et d’autre de la frontière franco-germanique, chaque comté s’apaisa. La trêve n’était pourtant pas synonyme de paix aux yeux de Baudouin.
1137 - Mons
Le petit oratoire du château de Mons était baigné d’une lueur blafarde, quelques cierges consumés fumaient encore. L’atmosphère jaunâtre et étouffante était pourtant ce que recherchait Baudouin depuis le matin et il ne pris la peine de se relever de ses prières que lorsqu’il entendit la porte s’ouvrir sur Alix. -Je sais que vous ne cherchez aucune compagnie, mais je ne peux porter ce poids seule aujourd’hui. Votre mère, vos vassaux, vos pages ou écuyers, tous ne m’adressent que regards affligés et paroles douloureuses à entendre. Le regard que lui adressa son épouse alourdi le poids du jeune comte, mais lui tendant une main apaisée, fit venir la jeune femme auprès de lui. -Ne craignez jamais de m’importuner, votre présence m’est toujours précieuse, lui assura-t-il. Outre les prières, cet oratoire a entendu un grand nombre de mes interrogations et je sais combien les affaires du comté vous sont importantes. Prenant la main de la jeune femme, il lui adressa un sourire rassurant, mais les cernes sous ses yeux marquaient la longue nuit qu’il avait passé. -La mort de notre fils est un dessein de Dieu, reprit-il dans un soupir. Je me force à m’en convaincre depuis cette nuit. -Ou une punition infligée, fit Alix d’une voix atone. Pour ce qui a été commis durant de longues années. Pour les innocents dont la vie a été prise pour assouvir une ambition.
Les mots frappèrent durement le coeur de Baudouin, si fortement qu’il ne su quoi répondre aux accusation couvées d’Alix. Il se mentait à lui-même s’il niait la violence des combats passés, mais son orgueil combattait le moindre aveu. Il était bien trop fier pour avouer les crimes commis, mettant sur eux la cause d’une justice à réparer. -Cette punition sera-t-elle donc levée si j’accepte l’injustice, répondit-il après quelques minutes de silence? Voilà dix ans que je sers l’Empereur Lothaire plus fidèlement qu’aucun comte de Hainaut auparavant, dix ans que la trêve est établie, dix ans que les Flandres sont en paix. -Parce que l’Empereur vous l’a demandé. Il avait besoin de votre soutien contre les prétentions des Hohenstaufen. Vous avez pour une fois accepté d’agir pour vos voisins, mais à contrecoeur. Assagissez-vous de votre propre chef, la paix sera réelle, et non seulement pour deux comtés, mais pour votre âme. -L’Empereur est mort, à présent. Me conseillez-vous donc de continuer d’oublier l’injustice qui frappe notre famille? -Laquelle? La perte d’un héritier, ou celle d’un comté, réagit Alix, reprenant quelques couleurs devant l’obstination de Baudouin? Nous aurons un autre fils, d’autres enfants, je ne pourrais les voir partir vous suivre, en songeant qu’à chaque instant, une mauvaise flèche pourrait les atteindre. -Si j’oublie les Flandres et me lance auprès du Pape pour soutenir le futur empereur, le danger sera le même, Alix. -Mais les raisons seront bien différentes. -La guerre d’un empereur a donc plus de légitimité que celle d’un héritier spolié, répondit Baudouin amèrement ?
La jeune femme se tut, préférant ne pas poursuivre la conversation dans une telle situation. La douleur qu’ils partageaient leur faisait voir le monde d’un oeil si noir qu’aucune décision raisonnable ne pouvait être prise. En dix ans, elle avait appris à connaître son époux et savait que le soutenir était également le défier. Elle connaissait assez ses sentiments envers elle pour ne pas craindre d’être écartée et cet argument était certainement ce qui l’aidait à espérer voir Baudouin songer à la paix. Le silence lourd enveloppa l’oratoire alors qu’un nouveau cierge venait de s’éteindre. Les paupières closes, Baudouin entendait la respiration lente d’Alix, et à chaque inaudible soupir, il ressentait comme une pointe de culpabilité.
-J’y songerai, fit-il abruptement en se redressant vers la jeune femme. Peut-être Dieu nous accordera-t-il sa miséricorde en nous donnant un nouveau fils. -Merci de m’accorder l’apaisement que je cherche depuis cette nuit. Il posa un regard contrit sur le ventre arrondi d’Alix, supportant fatigue et chagrin sans émettre la moindre plainte. -Retournez vous reposer, Alix, je me chargerai de veiller sur Laurence les prochains jours. -Je vous fais confiance pour cela, répondit la jeune femme dans un sourire. Elle serra la main de Baudouin avant de se lever et d’ouvrir lentement la porte de l’oratoire. Dans l’entrebâillement, une petite silhouette se tenait là, les cheveux aussi défaits que les traits de son visage.
-Laurence! As-tu donc encore échappé à Lorette, la gronda doucement Alix en caressant les cheveux sombres de l’enfant? -Je voulais retrouver Baudouin, mais il n’est nulle part, fit-elle d’une voix attristée. Où est-il allé? Je devais lui conter une nouvelle histoire aujourd’hui, il l’attend depuis hier!
La voix de l’enfant avait fait se retourner son père, qui comprit brusquement que sa fuite matinale - et quotidienne - l’avait tenue ignorante de la disparition de son cadet. Les yeux rivés sur la petite silhouette perdue, il sentit son coeur se serrer à nouveau et rejoignant la porte, pris la main de l’enfant dans la sienne. -Viens, Laurence, je vais te dire où est ton frère. Il croisa silencieusement le regard d’Alix et les prunelles bientôt embuées de larmes, elle préféra s’isoler à nouveau, laissant le père et la fille seuls dans le lieu saint.
Dernière édition par Baudouin de Hainaut le Ven 3 Jan - 10:47, édité 10 fois
Aliénor d'Aquitaine
Aujourd'hui, je suis reine☾ autrefois j'étais libre
Messages : 276 Date d'inscription : 01/07/2012 Age : 34 Localisation : Entre Paris et Poitier, cherchez bien, vous me trouverez surement
Feuille de route Mon coeur est: habité des vers d'un merveilleux poète Je suis né à: Poitier A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 12:10
Aliénor d'Aquitaine a dit:
Hello Baudouin ** bienvenue, ravie que tu aies pris ce personnage il est vraiment chouette!!
Je rebondis sur ce que tu as dis, à propos des propositions d'avatars, tu parles des "visages que nous connaissons" ou "visages inconnus"? S'il s'agit du premier, c'est normal, s'il s'agit du second, nous mettrons cela à jour alors
Baudouin de Hainaut
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 29 Date d'inscription : 30/12/2013
Feuille de route Mon coeur est: pris par mon épouse et mes enfants. Je suis né à: Mons, dans le Hainaut A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 12:53
Baudouin de Hainaut a dit:
Le temps des Croisades
1147 - Mons
Les bruits et les cris de liesse s’étaient étouffés dans les rues de Mons. Bien au-delà des remparts recouverts d’échafaudages qui surplombaient la ville, dans le château des comtes de Hainaut, l’heure n’était plus à écouter le prêche de Bernard de Clairvaux pour une seconde croisade en Terre Sainte, mais aux questionnements et aux choix. Malgré le choix de Baudouin de soutenir Lothaire III face aux puissants Hohenstaufen, il avait rallié le parti de Conrad III à la mort du précédent empereur, s’attachant ainsi un peu plus à l’autorité papale face aux rébellions qui menaçaient dans tout l’empire. L’Italie grondait, mais Conrad III tenait vaillamment les rênes du pouvoir. Pour le nouvel empereur, cette croisade était l’occasion d’assurer ses liens avec le Pape, mais également d’agir selon sa conscience chrétienne, et remettre entre les mains du Créateur un trône si chèrement acquis. L’empereur avait rallié Mons pour écouter l’éloquent moine, et tenter de faire rejoindre à lui l’un de ses vassaux les plus indiscernables. Trop proche de la France, trop gourmand, trop puissant, Baudouin de Hainaut était pour Conrad un appui à ne pas négliger.
Le comte n’avait, de son côté, laissé aucun détail à la solde du hasard, et pour faire perdurer l'indépendance discrète dont sa famille jouissait depuis de longues années, il se montra comme le soutien le plus indéfectible de l’empereur, n’omettant aucune occasion de le lui prouver. L’accueil qu’il réserva à son souverain fut à la hauteur des espérances de Conrad III.
-Je suis non seulement heureux, mais également satisfait de vous savoir parmi les nôtres, comte. L’empereur et Baudouin marchaient le long du chemin de ronde, sous le soleil clair d’avril, observant l’agitation de la ville sous leurs yeux. J’ai longtemps crains que vos allégeances passées ne vous poussent à rendre hommage à Henri de Bavière et me faire ainsi perdre un précieux allié. -Le bien de l’empire m’est important, répondit Baudouin. Les électeurs ont choisi avec raison, il est malheureux hélas de voir que la guerre s’en est ensuivi.
L’empereur fit quelques pas silencieusement, non sans jeter un regard intéressé à son vassal. -Mons s’étend, votre ville se fortifie, fit-il remarquer dans un sourire. -Aucun travaux n’avaient été entrepris depuis l’incendie qui a ravagé une partie de la ville lorsque je n’étais encore qu’un enfant, expliqua le comte en rejoignant le souverain. Dès mon retour d’Italie, je me suis penché sur l’agrandissement de Mons. Ces murs d’enceinte, montra-t-il, seront fortifiés dans quelques mois, et les frontières vont s’élargir pour ouvrir la ville. L’étouffement fut la plus grande cause de disparition lors de l’incendie. -Vous bâtissez, comte, releva Conrad III, cela vous fait-il oublier la Terre Sainte? Je sais que les guerres d’Italie auprès de mon prédécesseur vous a tenu longtemps éloigné de vos terres, mais Jérusalem vaut plus que le Milanais. Le regard de l’empereur montra à Baudouin que le souverain l’avait mené où il avait prévu. Il avait redouté cette question, s’attendant à la désapprobation de Conrad III. -Non, altesse. J’y ai longuement songé, ma mère m’avait poussé en ce sens peu avant de nous quitter. -Nous rejoignez-vous donc ? -Le comté de Hainaut ne peut rester seul alors que la situation n’est pas stable, commença lentement Baudouin. Mons n’est pas la seule ville à s’agrandir, l’impôt occasionne quelques rébellions pour lesquelles les provinces ont besoin de mon soutien. Mon épouse seule ne pourrait mater ces têtes fortes, et l’agitation à l’ouest me laisse à penser qu’elle n’aura assez de force pour calmer les plus dissipés. Comme vous l’avez dit, mon absence a coûté à l’unification du Hainaut. -Que se passe-t-il donc, demanda l’empereur d’une voix soucieuse? Ces maudites Flandres? Aucune paix n’est donc envisageable? -Une trêve est le terme juste, altesse. La situation du Tournaisis est pris entre France et Empire germanique depuis mon ancêtre. La région s’anime et s’agite depuis de nombreuses semaines, les rumeurs se confirment. Le conflit, malgré la trêve, a connu quelques soubresauts dont votre altesse a certainement eu connaissance. Les rumeurs m'inquiètent. -Quelles sortes de rumeurs? -Une armée, prête à ouvrir un conflit pour obtenir sa liberté et se libérer du joug de l’un de ses deux seigneurs. L’inconfort de Tournai devait un jour éclater, et je m’inquiète que ma potentielle absence ne vienne ouvrir une porte à la rébellion. -Ils n’oseront attaquer les terres d’un croisés. Bernard de Clairvaux l’a rappelé, comte! Risqueront-ils l’excommunication? -Je serais moi-même capable de prendre ce risque, alors pourquoi pas les flamands, répondit Baudouin dans un sourire? Je ne peux laisser mes terres gronder et partir en Terre Sainte, altesse. Le Ciel vient de me donner un fils, il m’importe de rester ici.
Un lueur de déception passa dans le regard impérial, mais le souverain se soumit au refus de son puissant vassal. Il avait longtemps craint que le comte de Hainaut ne prenne les armes contre lui, soutenant ses concurrents et son trône encore fragile, il ne pouvait le forcer à agir contre sa volonté. Conrad III préféra accorder au Hainaut une faveur, comme gage de paix. En échange, l’empereur profita de la présence de cet allié pour commencer l’œuvre d’union de son empire. -J’avais envisagé cette réponse, comte, aussi, je ne suis pas uniquement venu pour entendre Bernard de Clairvaux et découvrir la richesse de Mons, mais pour m’assurer de votre loyauté en vous confiant une lourde tâche. Le Tournaisis semble le parfait argument pour ce qu’il me faut vous demander. -Je vous écoute, altesse. Baudouin fit signe aux gardes qui les suivaient de rester à leur place alors que lui-même s’avança plus loin aux côtés de l’empereur. -Thierry d’Alsace est un homme sage, mais bien avant que je ne fus élu, ses prétentions pour le comté de Flandres m’inquiètent. Comme pour le Tournaisis en Hainaut, vous savez certainement - et de longue date! - que les Flandres sont sous souveraineté française et germanique. Mais le comte est assez puissant pour décider de s’affranchir de toute allégeance. L’expansion du comté pourrait lui donner plus de territoires, de pouvoir, et je refuse l’un et l’autre dans les mains d’un seul homme. -Qu’attendez-vous de moi? -Thierry d’Alsace rejoindra la Terre Sainte sous bannières françaises. Profitez de son absence pour agir auprès de son épouse, la diplomatie signe des traités. Vous savez que face à Alsace, j’aurai préféré que les Flandres vous reviennent enfin. L’indépendance actuel du comté ne convient ni au roi de France ni à l’empire. Vous gagnerez la confiance française, songez-y. -Je m’en chargerai, répondit brièvement Baudouin sans s’aventurer sur un tel terrain. Il connaissait assez le caractère de la femme de son cousin, aussi déterminée que lui, pour savoir que la diplomatie n’était pas encore la panacée pour régler le conflit. La crise passagère du Tournaisis pourrait m’apporter une raison d’agir en Flandres. Il s’apaisera sous peu, une approche serait alors possible, je pense.
Mais le bruyant Tournaisis ne se tut point. Vassal du roi de France, son seigneur épiscopal refusait d’être lé à l’Empire et l’armée que lui avaient fournis ses alliés menaçaient les premiers fiefs frontalier du Hainaut. Attaquer l’Empereur était une utopie, mais mettre le feu aux terres de son vassal était une première intimidation qu’il infligea à l’Empire. Enflammer le Hainaut pour pousser son seigneur à rendre compte de la situation était le plan fixé par le Tournaisis, et qui devait être le point de recommencement d’une guerre qui ne connaissait qu’une simple trêve. Les appels au calme avaient été inutiles, les premiers raids contre les rebelles n’avaient pas temporisé les ardeurs des plus bruyants d’entre eux et face à l’inaction du comté de Flandres, Baudouin s’agaça. Thierry d’Alsace avait rejoint la Terre Sainte, et sans son seigneur pour en tenir les frontières, passer celles-ci était une tentation trop forte pour être repoussée. Par le Tournaisis, la porte vers les Flandres étaient ouvertes, le comte pouvait être victime d’une mauvaise lame d’un hérétique et dans cette hypothèse, la course au pouvoir n’était qu’une question de calcul de temps. Le plus rapide repousserait ses concurrents. Baudouin n’avait-il pas le légitime accord de l’empereur pour agir?
Dès les premiers mois d’absence de Thierry d’Alsace, Baudouin avait cherché le moyen d’obéir à Conrad III tout en conservant assez de liberté pour faire passer une bataille dans ces plans impériaux. Son souverain ne lui avait-il pas demandé d’œuvrer pour l’unification du Saint Empire, de mettre un frein aux ardeurs territoriales du comte? L’occasion était bien trop belle et les derniers remparts d’hésitation furent détruits par sa femme elle-même. Si Alix de Namur n’avait auparavant cautionné les exactions commis par les Hennuyers à Audenarde, les années l’avaient faite mûrir et acquérir bien plus d’assurance. Certaine de l’oreille attentive que lui prêtait Baudouin, elle rallia lentement son parti, et l’implication de son époux dans les combats menés par le comte de Namur pour défendre le domaine, avait fortifié sa résolution. Jointes au Hainaut, les Flandres auraient donné à son seigneur un territoire étalé sur le nord de deux grandes souveraineté. Les libertés seraient aisément acquises, le comté uni ne pourrait subir de concurrence sans qu’elle ne fut matée. A la raison humaine se succéda la raison politique.
1148 - Artois
-Gardez-vous à gauche, messire! -Et vous, à votre droite, Olivier!
Sous son heaume, dans la sueur et la poussière, Baudouin fit pivoter son épée pour retenir l’un des assaillants d’embrocher son ancien écuyer, avant de s’étaler sur un cadavre ensanglantée, dont l’armure boueuse ne montrait plus aucun signe d’appartenance. Dans un grimace de douleur, il retira le reste de la flèche qui avait atteint sa jambe, sans heureusement lui être fatal. -Messire! -Laissez, ça n’est qu’un mauvais coup, grogna Baudouin en se tenant la cuisse. Elle n’est pas allée bien loin. Le jeune page avait bien grandi depuis vingt ans, mais il servait avec autant de ferveur son seigneur et parrain, et depuis son adoubement, il montrait de plus en plus de bravoure au combat, s’octroyant ce rôle d’ange gardien pour le comte, bien trop téméraire et inconscient à son goût! -Si vous parvenez à vous relever seul, je ne m’inquiéterai pas, répondit-il, têtu, en guettant néanmoins une possible charge de flamands. Baudouin râla silencieusement, mais plus buté que son ancien élève, se redressa péniblement à l’aide de son épée en ignorant la douleur qui traversa sa jambe. -Êtes-vous satisfait?
Dans une toute autre situation, Olivier aurait sourit à ce trait de caractère coutumier chez son seigneur, mais le combat continuait encore et très vite, un groupes d’ennemis avait aperçu les deux chevaliers isolés, dont l’un était tombé. -Attention, murmura Baudouin en relevant son heaume! L’attaque fut brève, mais éprouvante dans la chaleur de la journée de juin. Le combat durait depuis près de trois heures à présent, chevaux et hommes jonchaient le sol, et les silhouettes encore debout, vaillantes, donnaient les derniers coups d’épée que leurs bras leur permettaient de lancer. Au loin, le village brûlait, l’on apercevait une petite colonne d’habitants fuyant pillards, égorgeurs et maisons en cendres. Le soleil entamait sa lente descente lorsque retentit le premier son d’une corne, ramenant les combattants en arrière. Une vague de survivants recula, repoussant les dernières attaques de leurs ennemis, et bientôt, de part et d’autre du vaste champ de bataille, une brume estivale s’installa, humide et étouffante, ramenant le calme parmi les morts.
Dans la tente dressée dans le campement, Baudouin n’avait pas pris une minute pour s’asseoir et boitillant, suivi de près par Olivier, il faisait le tour des troupes, apaisant, rassurants et félicitant ses hommes. -Ils ont donné l’ordre de repli, lança-t-il satisfait au comte de Saint-Pol, l’un de ses plus fidèles vassaux! Comte, rassemblez les autres sous ma tente, la prochaine attaque sera décisive. Les armées flamandes sont amoindries, Sibylle n’a eu le temps de réagir, il nous faut profiter de cette lenteur! -Messire, un messager de la comtesse de Flandres vient d’arriver, je l’ai fait attendre. Le jeune écuyer de Baudouin avait couru jusqu’à lui, pressé de son montrer aussi zélé que son prédécesseur. -Parfait, j’espère qu’il m’amène de bonnes nouvelles.
Le Tournaisis avait été la porte de salut de Baudouin. A peine la petite rébellion matée, le comte avait profité de cette large brèche pour pousser ses armées dans les terres flamandes, rejointes bientôt par celles de ses vassaux. Inconscient de la menace d’excommunication qui pesait sur lui, il avait agité la demande de son souverain, Conrad III, pour légitimer cette attaque de force des terres du comte croisé. Thierry d’Alsace absent, Sybille d’Anjou prête à accoucher, aucun d’eux ne pouvait agir promptement. Ne renonçant à la sournoiserie maternelle dont il avait hérité une part, Baudouin avait décidé d’agir rapidement. Les actes trouvèrent justification dans la crise de Tournai, et les Flandres accusées d’attiser la rébellion furent désignées pour être la cible de la punition impériale. Sous cette égide, Baudouin élargi de lui-même la demande de l’empereur en envahissant les premiers fiefs flamandes, et gagnant un large terrain en enflammant l’Artois jusqu’à Arras. S’il n’était d’un cœur cruel et faisait preuve d’une grande humanité envers ses prisonniers, Baudouin ne pouvait pourtant tenir des soldats excités par l’ivresse des combats, et les nouvelles des ravages commis dans les villages artésiens lui revenaient régulièrement. Il s’efforçait d’agir contre les meneurs, de se faire assurer par ses vassaux de la répression qu’ils mettraient en place contre ces exactions. Mais rapidement, la poursuite du conflit reléguèrent ces mesures à un second plan. Ce fut hélas ce qui fit perdre au comte le terrain gagné.
-Monseigneur de Hainaut, fit l’envoyé en saluant Baudouin lorsqu’il releva la porte de la tente? -Lui-même, lança-t-il. Quelles nouvelles m’envoient ma cousine? -Elle vous demande la paix, messire, répondit l’ambassadeur en prenant le siège que lui tendait Baudouin. Celui-ci s'essuya le visage après s'être passé les mains dans une bassine d'eau claire. Il eu un large sourire, mais le regard féroce qui l’accompagnait ne pouvait détromper l’envoyé flamand. -La paix, reprit Baudouin? Quelle paix? Celle qui me tiendrait coi sur mes terres, laissant un usurpateur régner sur ce qui m’appartient, continua-t-il d’une voix forte? Il s’était rapproché de l’autre, se penchant sur son nez pour le fixer de son regard gris. Votre maître a largement profité de sa part, me plantant un couteau dans le dos dès que Cliton fut défait! J’ai accepté une trêve pour que mon domaine se relève, et non pour accorder à mon cousin un repos qu’il réclamait. L’empereur m’a demandé d’étouffer son désir d’indépendance, si Sibylle de Flandres veut me voir quitter mes terres, il faudra qu’elle passe sur mes armées et sur l’autorité impériale. Voici ma réponse, monsieur. Mes hommes sont encore prêts à se battre et ils le feront jusqu’à ce que je leur donne l’ordre de se retirer.
L'ambassadeur recula légèrement sa chaise pour s’éloigner de la figure féroce du comte. -Je le lui dirais, messire. -Je l’espère, fit Baudouin d’une voix tempérée, en se redressant. -Néanmoins, voici le traité que la comtesse de Flandres m’a chargée de vous faire lire. Elle espérait que votre réponse prenne une autre direction après cette lecture. Baudouin s’était laissé tomber dans une chaise, étendant sa jambe blessée. D’un geste, il appela son écuyer tout en arrachant le traité des mains de l’ambassadeur. -Appelez-moi Benoît de Gand, fit-il à voix basse au jeune adolescent. En attendant le retour du confesseur, Baudouin se plongea silencieusement dans la lecture du document remis, sous l’œil attentif du messager à qui l’on avait servi une collation. Malgré des manières rustres en pleine bataille, Baudouin n’oubliait jamais de traiter correctement ses invités, fussent-ils de mortels ennemis.
Le mot de “paix” sonnait pour le comte comme une défaite. Il aurait largement préféré une paix conclue pour délivrer Bruges d’un siège interminable, une reddition simple du comte de Flandres, et non un traité signé alors qu’une bataille allait reprendre peu de temps après. Son confesseur avait sur lui une influence grandement bénéfique, même si ses conseils semblaient parfois des leçons de moral auxquelles Baudouin goûtait peu. Dans cette affaire de paix, il prônait le traité, et tâchait de ménager son maître pour s’éviter le moindre problème, en admettant que signer en plein conflit empêchait parfois de lire entre les lignes d’un accord. Mieux valait accorder une trêve aux combats avant de signer.
-Ah, Gand, vous voilà! Lisez cela, je voudrais avoir votre avis sur cette idée folle. Baudouin passa le document au confesseur qui entreprit la lecture. -Qui de mon cousin ou de la comtesse a rédigé ce traité, demanda le comte pour patienter? -Par le comte, messire, mais la comtesse de Flandres l’approuve largement, ainsi que ses proches conseillers. Un silence lourd s’installa de nouveau, et Benoît de Gand releva sa tête impassible. -Messire, beaucoup de points seraient à revoir, car je connais vos attentes, et je crains que ce document n’y réponde en aucune manière. -N’en dites pas plus, Gand, vous avez parfaitement résumé ma réponse. Monsieur, fit Baudouin à l’envoyé, vous connaissez donc les termes exacts de ce que vous répondrez à Sibylle de Flandres. Je garde ce document et si l’idée d’une paix me prend à mon tour, je ferai parvenir à Gand mes propositions.
Sa voix n’admettait aucune discussion supplémentaire, et voyant la fin de l’entretien, l’envoyé se retira rapidement après avoir salué le comte. -Rendez-vous compte! Rendre Valenciennes! Abandonner la part qui me revient sur Tournai! Et pour quoi, en retour? Une promesse qui ne tient que sur un bout de papier! Qu’ai-je à faire de la partie de l’Escaut qu’il me laisse? Elle me sera coupée sitôt les frontières passées. Repoussant sa chaise, il laissa éclater sa colère sitôt le messager parti. La soudaine et vive douleur de sa jambe tira à Baudouin une grimace qui inquiéta le confesseur, mais sur un geste de la main de son pénitent, il reste à sa place. -Une paix est-elle réalisable, mon père, demanda le comte d’une voix plus calme en se rasseyant? -Elle l’est, mais vous avez raison, des concessions sont nécessaires. Ce traité aurait réduit les limites de vos terres et abaissé certains pouvoirs de vos vassaux frontaliers. Il a du être rédigé avant le départ du comte pour la Terre Sainte, lorsque les campagnes d’Italie faisait entrevoir une possible succession sur le Hainaut. Maintenant que vous avez un fils, il faut se montrer plus sage. Ce ne sont plus quelques batailles isolées comme l’a fait par exemple le comte de Saint Pol ces dernières années, qui assureront une victoire et une paix durable. -J’ai un fils, repris Baudouin, mais j’en eu un autre. Les plans de Dieu sont imprévisibles. Il me faut l’assurance qu’en cas d’une succession difficile, le Hainaut ne sera le lieu de nouvelles prétentions, destituant mes filles de leur part. -Une alliance seule pourra assurer cela, messire, prononça lentement le prêtre, plongeant Baudouin dans un profond mutisme. -Nous en reparlerons, coupa-t-il. Ce mot ouvre de larges portes qu’on ne peut parfois refermer et il faut y songer avec prudence. Benoît de Gand senti que l’entretien politique touchait à sa fin. Il se dirigeait vers la porte lorsque le comte l’arrêta de la main. -Restez, s’il vous plaît. Mais cette fois en tant que confesseur et non plus comme conseiller.
Le temps des alliances
1148 - Mons
A l’écart des salles et des galeries du château, le logis du comte était baigné dans un étrange calme. Le brouhaha de la cour montait jusqu’aux étages du château malgré les larges murs, mais derrière la porte recouverte d’une tapisserie flamboyante, le silence revint enfin. Alix de Hainaut était remontée se réfugier après avoir salué le retour des chevaliers et des soldats, ne participant pas aux réjouissances premières. Le banquet s’organisait dans la grande salle aux étages inférieurs, mais restant auprès de ses enfants, la comtesse avait décrété qu’elle ne descendrait que lorsque l’on aurait besoin de ses conseils avisés. Yolande, 6 ans, venait de terminer ses travaux de lecture et jouait avec son petit frère lorsque la porte s’ouvrit sur le comte de Hainaut, faisant se retourner Alix qui n’avait quitté la fenêtre des yeux.
A peine la porte s’était-elle refermée que l’enfant s’était précipité vers Baudouin, serrant dans ses bras son père qu’elle n’avait vu depuis de longs mois. -Vous nous avez tant manqué! Est-ce si loin, la Flandres, pour que vous ne puissiez revenir? -J’aurais pu aller à Constantinople, sourit le comte en embrassant sa cadette. Où s’est donc enfuie Laurence, demanda-t-il ? -Elle a décrété qu’elle voulait vous voir seul, sans doute a-t-elle d’horribles secrets à vous dire, se railla Yolande, habituée aux humeurs indépendantes et parfois fantasques de son aînée. -Vas donc la chercher, l’assura son père en passant une main dans les cheveux de Yolande, qui déguerpi en quête de sa soeur.
Resté seul auprès d’Alix, Baudouin avait pris le garçonnet dans ses bras, rassuré de la bonne santé de Godefroy. Il était l’unique héritier de ses terres, mais bien plus robuste que le fils qui leur avait été enlevé, l’enfant promettait de vivre bien plus longtemps et en meilleure santé. -Il ne pourra renier son père, fit Alix dans un sourire alors que Baudouin reposait l’enfant qui babillait. Il décide déjà de ses jeux, râle lorsque le lait n’est à son goût et n’a déjà peur de rien. Je suis déjà inquiète de l’avenir, en conclut-elle dans un rire. Je suis heureuse de vous revoir enfin, et en pleine santé malgré la blessure dont vous m’avez parlé dans votre missive. -Elle me laisse en paix pour le moment, répondit-il en la prenant à son tour dans ses bras. Il sentit tout le poids qu’avait du porter Alix durant ces longs mois de conflit lorsqu’elle se blottit contre lui, telle Yolande quelques minutes auparavant. Nos enfants se portent bien, mais vous, Alix? Je vous connais assez pour savoir que vous ne m’avez pas encore tout dit. -C’est vous qui n’avez pas encore tout dit, Baudouin, répondit-elle en relevant ses yeux vers lui. Quel est le résultat de cette campagne? La réponse de Sibylle de Flandres a été désastreuse pour le Hainaut, ses hommes n’avaient pas combattu aussi longtemps que les vôtres, le retour inopiné du comte ont ruiné tout espoir et l’empereur, à peine rentré de Terre Sainte, a bien d’autres affaires à traiter qu’un conflit au bord de ses frontières. Sait-on au moins seulement si le roi de France s’y intéresse? -Qu’avons-nous convenu il y a un peu plus d’un an, lorsqu’il nous fut évident d’agir? -Que l’issue de cette nouvelle attaque déterminerait l’avenir. Mais nous avons été défait, le Hainaut aux frontières panse ses plaies, vos paysans ont été ravagés, des villages incendiés en réponse aux exactions de nos soldats. Est-ce donc l’abandon? La voix d’Alix trahissait ses véritables pensées, et n’avait aucun accent de défaite. -Je refuse de courber l’échine devant eux, répondit fermement Baudouin. Une trêve est à nouveau nécessaire pour que nos fiefs puissent se relever et nos soldats se reposer, mais à présent que le comte est revenu de Terre Sainte, je me mesurerai de nouveau à lui et non à Sibylle. Le visage sombre, Baudouin revoyait ses hommes tombés, son armée en déroute. Cette ultime bataille avait été la plus terrible pour les soldats, qui avaient trop tôt rendu les armes dès que la rumeur de la mort de leur seigneur avait parcouru les rangs. Son fidèle et fier étalon tué sous lui, Baudouin ne devait la vie qu’au jeune comte Hugues de Saint Pol qui l’avait gardé le temps de l’aider à s’extirper de sous le caparaçon. Mais cela avait suffit à propager la nouvelle et épuisés par des mois de lutte, exténués et ne tenant que par le dynamisme de leurs chefs, nombreux étaient les soldats qui avaient rendu leurs armes, malgré les harangues des chevaliers alliés. L’ennemi avait profité de la déroute pour s’imposer et de nouveau blessé, Baudouin n’avait pu poursuivre lui-même le combat. Plus que sa jambe, son orgueil avait été profondément meurtri.
-Une fierté se recouvre plus longuement que la santé, traduisit sagement Alix en passant une main douce sur la joue de son époux. L’heure est à la réflexion, à présent. Si je vous enjoignais à la sagesse bien avant de vous pousser à prendre les armes, je ne peux aujourd’hui que revenir à mes anciennes paroles. Thierry a rappelé ses troupes, peut-être serait-ce le temps de la paix? Baudouin avait relâché son étreinte pour se laisser tomber dans un fauteuil. Un nuage passa sur son front à l’évocation de la paix. -Benoît de Gand est un précieux confesseur, et un utile conseiller. Selon ses dires, et je l’approuve, seule une alliance pourra sceller une paix véritablement durable. -Une alliance? -Matrimoniale, précisa Baudouin alors qu’Alix le rejoignait. Philippe et Matthieu seraient deux possibles prétendants pour Laurence ou Yolande lorsqu’elle sera en âge. -S’il le faut, alors songeons à cette éventualité. Ils sont cousins, mais assez éloignés que que le Pape n’ai a accorder de dispense. -Il y a également des appuis à chercher auprès de l’empereur ou de la France. Si Louis VII a confirmé les prétentions de Thierry sur les Flandres, tous ses vassaux ne suivent pas ses décisions politiques et Thierry est bien plus indépendant que je ne le suis moi-même vis à vis de l’empereur. Il fait de l’ombre. -Réfléchissons à cela lorsque vous serez reposé, Baudouin, répondit Alix non sans un sourire. Ensemble, nous ne pourrons que trouver la solution qui convient au comté, faudrait-il marier Laurence à un pauvre homme qu’elle mènera par le bout du nez!
Baudouin n’eut que le temps d’embrasser Alix, avant que la porte ne s’ouvre sur une silhouette fine aux cheveux bruns savemment noués derrière sa nuque. Le sourire éclatant et les yeux brillants d’intelligence, Laurance se jeta littéralement dans les bras de son père qui, lâchant un soupir, déposa un baiser sur la joue fraîche de la jeune fille de 19 ans. -J’espère que cette fois, ni Italie ni Flandres vous ferons partir! Je suis si heureuse de vous revoir! -Et moi de même, ajouta sa mère dans un sourire. Voici enfin un peu d’autorité qui te fera du bien, jeune fille! Laurence jeta un regard faussement contrit à sa mère. -J’espère néanmoins que ce retour ne présage pas de nouvelles plus mauvaises que cette déroute, reprit-elle plus sérieusement. Mon oncle se refuse encore à une paix qui arrangera les deux partis? -Hélas, oui. Mais le temps nous laissera songer à d’autres accords. -Tant que vous ne décidez pas de me faire épouser l’un des fils du comte, je vous soutiendrai en tout, papa! Mais je sais que cette idée ne vous est pas venue, n’est-ce pas? -Certainement, assura Baudouin d’une voix suffisamment confiante pour que Laurence en soit satisfaite.
-Je ne suis officiellement mêlée à aucun accord, lança Alix en levant les yeux au ciel, lorsque la jeune fille eu refermé la porte derrière elle! Mais ne cédez pas encore à l’un de ses caprices. -Bien sûr que non, répondit son époux aussi sûr de lui que devant sa fille!
La lourde défaite d’Artois avait blessé l’orgueil de Baudouin, mais plus que jamais, il se sentait injustement repoussé et ressentait l’irritation naturelle d’un héritier privé de ses biens. Près de cent années s’étaient écoulées depuis que Robert le Frison avait dépossédé son ancêtre des Flandres, mais ce sentiment d’injustice ne s’était tarie. Laurence, en digne fille de son père, vivait aussi difficilement cette défaite politique. Le lien qui unissait Baudouin à son aînée était bien souvent perçu comme inconcevable - Laurence n’était pas un fils! - mais le comte n’avait pu reléguer sa brillante fille à un rôle d’apparât jusqu’à son mariage. Son union avec Alix, curieuse et fine stratège, s’était révélé si parfaite qu’il ne pouvait se résoudre à ne pas éduquer Laurence à l’instar de sa mère. Une jeune fille au fait des affaires diplomatiques ou politiques pouvait être bien plus précieuse et l’alliance qu’il contracterait lorsqu’il serait temps de songer à son mariage pouvait être importante.
L’unique ombre à ce tableau était le manque d’autorité évident dont Laurence jouissait depuis l’enfance, et due à la tragique disparition de son frère cadet. Terrifié à l’idée de perdre le seul enfant qui lui restait, Baudouin avait couvé sa fille, lui accordant larges permissions et exauçant tous ses souhaits enfantins. Et malgré la venue au monde de Yolande, douze ans après Laurence, l’aînée restait incontestablement celle qui prenait une grande part dans le coeur de son père. Tantôt capricieuse, tantôt sournoise, l’intelligence de la fille valait celle du père et Alix n’avait jamais cherché à avoir plus d’autorité sur Laurence; essayer était même un vain effort!
Hiver 1150 - Mons
Deux ans avaient passé depuis la retraite d’Artois. Deux ans durant lesquels la trêve aurait été totale si certains de ses vassaux n’avaient poursuivi son œuvre sur la frontière flamande. Baudouin n’avait pris part qu’à une unique bataille afin de protéger son fidèle vassal de Saint-Pol, mais la mort de Hugues de Campdavaine, fils de son plus fidèle et terrible allié, avait stoppé l’avancé hennuyère. Le nouveau comte de Saint-Pol, Anselme, avait aussitôt retirée son alliance, marquant la fin d’une confiance de longues années. La disparition de l’hérétique Hugues de Campdavaine en 1141, père du précédent, avait été un rude coup pour Baudouin qui avait senti le poids des années peser sur ses épaules et le danger de ces conflits alors qu’aucun héritier n’était en âge reprendre le Hainaut. Cette mort fut décisive pour la trêve qui calma le conflit sur de longues années.
Dix années après, le loup de Saint-Pol hantait encore le comté de son allié lorsqu’une nouvelle grossesse d’Alix avait retenu Baudouin à Mons. Face à l’orgueil blessé d’un lion, seul l’espoir de voir sa lignée assurée pouvait forcer le comte à se tenir sage. Alors que l’hiver rude avait fait s’aliter Alix, Baudouin avait plus que jamais demandé la présence de Benoît de Gand à ses côtés, et pris de cette soudaine lubie religieuse, avait entreprit de trouver un moyen de chauffer les lieux saints afin de pousser la population à la dévotion, trouvant dans la retraite une paix profonde et nécessaire. Laurence avait soupiré à cette idée, s’efforçant néanmoins de rassurer son père sur la santé de la comtesse, pourtant considérablement affaiblie. Entre temps, trois villes avaient commencé la construction d’une nouvelle église pour remettre dans les mains de Dieu et protéger les places d’attaques flamandes...ou la comtesse d’une mauvaise fièvre! L’inquiétude l’avait tant gagné qu’il avait confié Godefroy à deux nourrices supplémentaires qui devaient le veiller chaque nuit, avant que Yolande ne se plaigne de recevoir moins d’attention que ses frères et soeurs. En réponse, elle fut fiancée à Yves de Soissons et Baudouin lui assura ainsi qu’il pensait autant à elle qu’à Godefroy ou Laurence.
Cette dernière s’agaçait de cet hiver lent et rude, poussant son père à réfléchir à un accord avec les Flandres, qui leurs donneraient assez de largesses pour en être satisfaits. Elle aurait préféré voir son père plus combatif, mais se résigna à leurs parties d’échec quotidienne lors desquelles elle tâchait de connaître les volontés paternelles. Mais plus taciturne qu’il n’avait jamais été, Baudouin se confiait peu à sa fille qui cherchait comment rompre ces langueurs hivernales.
-Papa, faites attention à votre tour. Levant les yeux sur le comte, elle l’observa, plongé dans ses réflexions, ses yeux gris allant d’une pièce à l’autre du plateau. Elle se rappelait de leurs premières parties, lorsqu’il lui apprenait comment duper son adversaire, comment placer au mieux ses pièces, comme des soldats sur un champ de bataille. Elle se revit un court instant, assise sur ses genoux alors qu’il lui racontait l’histoire de chacune des pièces, inventée d’un bout à l’autre, mais qui avait ravi la fillette qu’elle était alors. Mais sous ces cheveux à présent clairsemés de gris, les yeux gris de son père n’avaient rien perdu de leur lueur farouche et elle ressenti une pointe de fierté et d’orgueil d’être la digne descendante de ce comte dont le nom seul agaçait des souverains. Baudouin avait à peine posé sa tour pour contrer sa fille que la porte s’ouvrit à la volée sur l’une des suivantes d’Alix de Hainaut, rouge d’avoir couru. -Monseigneur! L’heure est venue, se contenta-t-elle de dire, le regard un peu perdu! Le coeur de Baudouin fit un bond dans sa poitrine alors qu’il s’était retourné dans son fauteuil, incapable d’esquisser le moindre geste. -Bien, fit-il d’une voix blanche. Je vous serais inutile….prévenez-moi dès que possible, parvint-il à dire malgré la gorge nouée. La jeune femme hocha la tête avant de refermer la porte.
-Tout se passera bien, papa, rassura Laurence dans un sourire. Elle est forte, elle n’aura besoin que de repos. -Puisses-tu dire vrai, soupira Baudouin en s’enfonçant dans son fauteuil. Elle n’a jamais été aussi faible. La jeune femme ne su que répondre et posa son regard sur ces yeux à présent teintés d’une profonde crainte. Bien que proche de son père, elle n’avait jamais cherché à connaître quels sentiments réels unissaient ses parents et jusqu’alors n’avait jamais osé le découvrir, mais ce jour-là, au visage pâle de son père, elle réalisa que cette union pourtant totalement politique avait, au fil des ans, dépassé de simples intérêts territoriaux. Un sourire doux aux lèvres, elle repoussa son fauteuil pour se rapprocher de lui, s’agenouillant pour glisser ses mains dans les siennes. -Elle se portera très bien….et je suis certaine qu’elle me donnera un autre frère. -Ne te force pas à me rassurer, répondit-il en souriant malgré tout. -Je l’ai prié toutes ces dernières semaines. Yolande, malgré le coup que vous lui avez porté en la fiançant si rapidement, vous a également pardonné en priant pour cela et je suis sûr que Godefroy malgré son jeune âge, a su atteindre le Ciel. Et n’ai-je pas près de Dieu un autre frère pour recevoir nos prières? Baudouin n’eu aucun courage pour reprendre sa fille en ajoutant que Dieu avait rappelé à lui un autre de leurs enfants avant qu’il ne puisse voir le jour. Orphelin dès l’âge de douze ans d’un père qui n’avait montré que patience et sagesse, Baudouin s’était refusé à voir grandir ses enfants loin de lui, à leur ôter cette tendresse qu’il avait pour chacun d’eux. Lui qui avait grandi auprès de gouverneurs et de conseillers, voyant sa mère quitter son rôle maternel pour celui d’une femme politique n’avait souhaité leur donner de vivre une telle enfance. Sans négliger un seul détail de leur éducation, Baudouin et Alix avaient su rester proches de leur progéniture pour mieux leur transmettre ce qu’aucun gouverneur ou maître ne pouvait leur apprendre: des valeurs familiales qui avaient depuis de longs siècles construit l’éminence de leur famille. La Maison de Flandres, quoique divisée depuis cent années, jouissait d’un prestige que nul professeur ne pouvait transmettre.
Il se pencha doucement vers Laurence, déposant un baiser sur son front. -Avec tout ceci, Dieu ne pourra qu’exaucer nos prières, répondit-il en souriant alors qu’elle se relevait. Poursuivons notre jeu, c’est là le seul moyen pour me faire penser à autre chose. Ce fut au bout de deux heures que la porte s’ouvrit à nouveau sur la dame de compagnie, plus rouge qu’avant, mais le visage radieux. -Monseigneur! Vous avez un second fils! Madame est fatiguée, mais tout danger est écarté! Cette fois, le coeur de Baudouin sombra définitivement sous le coup de la surprise, mais un large sourire illumina enfin son visage et ralluma la flamme de son regard clair. -Venez, père, lança Laurence gaiement! Nos prières ont toutes été exaucées! Un jour, peut-être ne serons-nous plus sur terre hélas, mais les Flandres et le Hainaut seront de nouveau réunis sous leur juste héritier, nous pouvons à présent le croire! La gaieté de sa fille entraîna enfin Baudouin qui repoussa son fauteuil pour découvrir ce second fils, celui qui annonçait un ciel dégagé pour l’avenir et qui, comme signe d’une promesse future, porterait son prénom.
Le temps de la sagesse
1151 - Mons
-Yolande, cessez cette humeur massacrante et allez saluer votre père et votre soeur, gronda Alix aux pieds de l’escalier qui menait au logis seigneurial! On entendit un murmure et la silhouette de l’enfant de 9 ans descendit enfin, la mine renfrognée. -Vous êtes encore bien trop jeune pour les accompagner à Paris, voyons! Yolande ne répondit rien, s’efforça de lâcher un sourire qui contenta la comtesse de Hainaut, avant d’être poussée dans la cour déjà grouillante des préparatifs du départ.
-Au revoir, Laurence, lança-t-elle alors que sa soeur se penchait vers elle pour la serrer dans ses bras. -Cesse de faire la tête, lui souffla-t-elle à l’oreille! Tu rechignes encore à ces fiançailles, mais tu sais, ça n’est qu’un accord. Beaucoup de fiançailles se rompent avant que la jeune fille ne soit en âge de se marier, ajouta-t-elle avec un petit clin d’oeil discret. L’enfant sorti de sa bouderie et eu un sourire en coin. -Mais toi, tu choisira qui tu voudra, papa t’accorde tout. Un chevalier à Paris te fera la cour, comme cela se fait ici, marmonna Yolande. Ils ne me donneront qu’à un petit seigneur, et je passerai la fin de ma vie à ne pas aimer un époux grincheux. Laurence se retint de rire devant cet étalage théâtral et pris les mains de sa cadette. -Je peux te confier un secret? L’autre hocha la tête. Sais-tu qui me fait la cour en ce moment? Philippe de Hesdin, l’un des fidèles vassaux du comte de Flandres! Alors peut-être préférerais-je un seigneur choisi avec soin par mon père, plutôt que répondre à ce fol’amour de Hesdin. Et crois-tu qu’il y ai la moindre rancoeur entre notre père et notre mère? Sais-tu qu’ils ne se sont rencontré la première fois que le jour des noces? Yolande eu enfin un sourire amusé et lâchant les mains de son aînée, partit enfin saluer son père, le coeur réconforté, en espérant que son époux soit aussi brillant que son imagination d’enfant lui faisait voir.
Le jeune Godefroy, à peine âgé de 4 ans, avait simplement compris que son père partait pour longtemps, mais pour le dernier-né de la famille qui portait le prénom de son père, cette agitation restait incompréhensible. Dans les bras de Baudouin, l’enfant observait les chevaux harnachés avec curiosité dans un silence habituel. -Cet enfant se montre aussi bavard que vous, soupira Alix en reprenant le benjamin pour le confier à sa nourrice. -C’est un excellent signe, répondit-Baudouin en se préparant au départ. Il s’assura du harnachement de sa monture et lança à ses hommes le signe du départ avant de se tourner une dernière fois vers sa femme. J’aurais préféré vous avoir à mes côtés à Paris. -Je tiens à m’assurer de l’éducation de nos enfants. Yolande et Godefroy sont trop jeunes encore et je ne peux me résoudre à laisser ou emmener Baudouin avec nous à Paris. Il n’a qu’un an à peine. -J’espère pouvoir vous donner de promptes nouvelles, sitôt arrivés. -J’espère que nos affaires pourront prendre là un nouveau tournant, surtout.
Baudouin aurait souhaité serrer une dernière fois Alix dans ses bras avant de la quitter, mais dans la cour remuante de valets et de pages, il ne pu que déposer un furtif baiser sur les doigts de sa femme, avant de se hisser sur sa selle et de donner l’ordre du départ. Cette fois, point de guerre ou de batailles, la diplomatie reprendrait toutes ses lettres de noblesse sitôt passées les portes de la capitale du royaume de France. Et à ce jeu, le lion du Hainaut se montrait aussi impitoyable que sur un champ de bataille.
1151 - Paris
-....et vous direz à Coteels que je l’attends ce soir, qu’il ne soit pas en retard! -Bien messire! Le valet de Baudouin à peine parti, celui-ci longea les galeries pour retrouver celle qu’il avait patiemment attendu de voir depuis son arrivée à Paris quelques jours auparavant. Sibylle d’Anjou était venue seule, laissant Thierry d’Alsace loin d’elle. Etait-elle plus manipulable que son époux? Baudouin en doutait, tant la ténacité dont elle avait fait preuve marquait encore douloureusement son orgueil. Mais la violente réponse du comte de Flandres était également à ses yeux une maladresse diplomatique: Baudouin avait assuré avoir tout mis en oeuvre pour défendre ses hommes des moindres violences faites aux populations, alors que son rival avait sciemment ravagé les fiefs frontaliers par pure vengeance. L’affaire était difficile à digérer pour celui à qui on avait inculqué l’honneur d’une parole. Sibylle présente à Paris pourrait enfin répondre ouvertement à Baudouin sur les affaires récentes. Le traité qu’elle lui avait fait parvenir était resté en l’état depuis près de trois ans et soit ce parchemin, soit la guerre terminerai ce conflit centenaire. Ils s’étaient déjà croisé aux différents cours germaniques, mais ils ne s’étaient alors que jaugé, échangeant quelques politesse d’usage afin de ne froisser leurs hôtes. L’un et l’autre se ressemblaient malgré leurs styles différents, et l’affaire ne semblait hélas pas proche de sa conclusion.
Descendant les degrés, il tourna vers un couloir isolé, non loin des escaliers remontant des cuisines, mais à peine avait-il pivoté qu’une chose vivante lui rentra dedans de plein fouet, manquant de le faire tomber et cognant contre sa vieille blessure. La douleur ravivée élança Baudouin qui dans un geste de colère, attrapa au collet le drôle d’oiseau avant de le plaquer contre la muraille. -Idiot! Ta tête d’écervelé ne pouvait donc pas te faire penser à regarder où tu cours ou es-tu trop stupide pour le savoir! Sais-tu au moins qui tu as manqué de renversé, bougre d’imbécile! Il le secoua comme un prunier avant de le relâcher. L’autre s’affaissa sur le sol avant de détaler comme un lapin, les yeux roulant de terreur. -C’est ça, fuis donc au lieu d’assumer, gromella Baudouin en se frottant la jambe ! Tu volera moins loins lorsque j’aurais remis la main sur tes plumes!
Ce ne fut que le lendemain que Baudouin compris que l’oiselet avait décidé de ne pas assumer son acte….ou plutôt ses actes. Bien mal en pris au téméraire, car quiconque connaissait assez le comte de Hainaut savait qu’il valait mieux chercher son pardon - qu’il accordait volontiers - plutôt que de s’enfoncer dans une telle désastreuse situation et risquer une longue rancune. A peine Baudouin avait-il regagné la cour qu’un bruit suspect lui fit lever les yeux. Mais le gamin avait déjà lâché sur lui tout le contenu d’un seau d’eau qui s’écrasa aux pieds du comte, éclaboussant ses vêtements mais surtout, faisant monter en lui une colère noire, celle qu’il réservait d’ordinaire aux partisans de l’usurpateur. Il jeta un regard noir au gamin qui par erreur, était resté penché pour observer son oeuvre. Le poursuivre aujourd’hui - et dans un tel état! - était inutile, mieux valait remettre cette douce vengeance à plus tard. Les colères de Baudouin duraient peu, mais elles faisaient naître en lui un regain de détermination qui pouvait parfois se révéler bien plus douloureux pour ses ennemis.
-Messire! Que vous est-il arrivé! -Un galopin qui se fera tirer les oreilles au sens littéral du terme, Olivier, grogna Baudouin en jetant un regard sombre à son vassal pour empêcher tout sourire. -Un gamin aux cheveux noirs, l’air ahuri? -C’est cela même! -Je le saluerai en votre nom dès que je le croiserais, s’amusa le jeune chevalier. Ce jeune écervelé regrettera son geste, je crois! -Il a heureusement mal visé, reprit Baudouin dans un soupir en jetant un oeil à ses vêtements, je dois retrouver Benoît de Gand sous peu. -Sibylle de Flandres a-t-elle répondu à votre missive? -Pas encore, mais je serais pour une fois patient. Paris est un terrain de jeu assez vaste pour un homme vassal de deux puissants souverains, ajouta Baudouin dans un regard sournois. -Alors je reste à votre service si vous souhaitez bouger quelques pions. -Merci. Et dites à votre fils que je suis très satisfait de lui. Je n’avais eu un tel page depuis de nombreuses années!
Les deux hommes se quittèrent enfin et jetant un dernier regard à l’étage supérieur, Baudouin se demanda un instant si ce bain glacé était la sensation qu’il aurait lors d’une future entrevue avec Sibylle de Flandres. Il ne pu que songer à la lettre d’Alix reçue le matin même ou au caractère de Laurence qui allégeait un quotidien fait d’intrigues en devenir. Paris, lui avait-on assuré, le changerait des champs de bataille!
♡ ♧ ♢ ♤
(et comme je suis un peu nulle à faire des conclusions, là on va dire que ma fiche est terminée, hein, comme ça, si vous vous ennuyez ce week-end, vous pourrez lire les quelques 13880 mots qui parlent que de Baudouin.)
Dernière édition par Baudouin de Hainaut le Ven 3 Jan - 10:26, édité 3 fois
Aliénor d'Aquitaine
Aujourd'hui, je suis reine☾ autrefois j'étais libre
Messages : 276 Date d'inscription : 01/07/2012 Age : 34 Localisation : Entre Paris et Poitier, cherchez bien, vous me trouverez surement
Feuille de route Mon coeur est: habité des vers d'un merveilleux poète Je suis né à: Poitier A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 13:05
Aliénor d'Aquitaine a dit:
Ok merci de la précision, on s'en occupera au plus vite alors ^^
Hermine de Campdavaine
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 38 Date d'inscription : 30/11/2013 Age : 29
Feuille de route Mon coeur est: libre et à prendre. Je suis né à: Saint-Pol, en Flandre A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 14:57
Hermine de Campdavaine a dit:
Baudoin, crève *mode Hermine off*
Bienvenue à toi! Et puis Viggo quoi Finis vite ta fiche, je crois qu'on aura à discuter tous les deux...
Alphonse de Toulouse
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 115 Date d'inscription : 23/05/2013
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 16:11
Alphonse de Toulouse a dit:
Welcome!!!!!!!!!!!!!!!!! un flamand de plus, yeah!!!!! Vive vous!!!!
Henri de Champagne
PREUX CHEVALIER ☩ L'honneur en armure, La bravoure en bouclier, La gloire en étendard
Messages : 605 Date d'inscription : 10/12/2012 Localisation : Entre mes terres de Champagne, celles de mon frère à Blois, la cour de Louis VII et Châteauroux
Feuille de route Mon coeur est: tout dévoué à ma famille et à mon honneur Je suis né à: Vitry (Champagne) A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 22:19
Henri de Champagne a dit:
Bienvenue parmi nous
Avec un personnage tel que Baudouin, tu vas faire des étincelles, j'ai hâte de te compter parmi nous . Bon courage pour la suite de la rédaction de ta fiche, je vois que tu es inspiré, je vais lire ça très vite !
A très vite
Louis VII
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 40 Date d'inscription : 17/11/2013 Age : 31 Localisation : En mon palais, sur mes terres, partout là où se trouve un roi.
Feuille de route Mon coeur est: tout entier dévoué à sa cause. Je suis né à: Paris, dans le Palais de la Cité. A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 22:36
Louis VII a dit:
Oh, le comte de Hainaut
Bienvenue parmi nous ! J'ai lu le début de ta fiche, j'ai hâte de lire la suite ! Bon courage pour la rédaction ! (non puis, entre joueuse... merci, on va pouvoir voir Viggo Mortensen se balader sur le forum quoi )
A très vite j'espère ! Il nous faudra un lien !
Flore d'Evreux
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 86 Date d'inscription : 24/04/2013 Localisation : A la Cour du roi.
Feuille de route Mon coeur est: à cette heure, à personne. Je suis né à: Si seulement je le savais ... A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 22:48
Flore d'Evreux a dit:
Ben moi je dis que cette Alix a bien du bol ! Viggoooooooooo quoi ! :P
Bienvenue sur LOT très cher Baudouin ! Je compte bien avoir aussi un lien avec ton perso qui au délà d'atouts physiques certains, rockes du poney !
Aénor de Lusignan
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 50 Date d'inscription : 10/12/2012 Age : 32
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Lun 30 Déc - 22:56
Aénor de Lusignan a dit:
Viggggggooooooooooo
Bienvenue à toi <3
Baudouin de Hainaut
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 29 Date d'inscription : 30/12/2013
Feuille de route Mon coeur est: pris par mon épouse et mes enfants. Je suis né à: Mons, dans le Hainaut A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Mar 31 Déc - 10:40
Baudouin de Hainaut a dit:
Si seulement tous ceux qui trouvent la-bouille-à-Viggo adorable pouvaient aussi servir les intérêts de Baudouin, ça serait classe
Merci à tous, et je fonce poursuivre mon roman (et mes recherches )
Béatrice de Breteuil
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 127 Date d'inscription : 12/12/2012 Age : 37
Feuille de route Mon coeur est: Henri Plantagenêt Je suis né à: Breteuil A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Mar 31 Déc - 15:37
Béatrice de Breteuil a dit:
Waw quelle fiche prometteuse !
Bienvenue à toi en tout cas, j'ai hâte de te voir parmi nous !
Henri Plantagenêt
Où apparaît la force, le droit commencer de rayonner
Messages : 401 Date d'inscription : 01/07/2012 Localisation : Angers, le Mans, l'Angleterre, et bientôt Paris...
Feuille de route Mon coeur est: à moi seul. Je suis né à: le Mans, en ma chère Normandie. A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Jeu 2 Jan - 10:53
Henri Plantagenêt a dit:
Juste quand je retrouve une connexion internet, la vie n'est-elle pas merveilleuse BIENVENUE PARMI NOUUUUUUUUUUUUUUUUUUUS BAUDOUIN, je ne peux que te féliciter pour ce choix de PV qui dépote grave, si tu savais comme je suis CONTENTE d'en voir un sur le forum !
Je suis actuellement dans le sud en famille (où je pensais avoir internet mais en fait NON, pub mensongère), mais je reviens complètement le 7, donc si tu finis ta fiche avant ma collègue Aliénor te validera, sinon c'est moi qui m'occuperai de toi (mais vu le début de ta fiche, je ne m'inquiète pas trop) si tu as la moindre question ou le moindre souci, n'hésite donc pas à contacter Aliénor, ou moi à partir de mardi matin \o/
Encore une fois bienvenue parmi nous jeune padawan, comme tu le vois tout le monde est ravi d'avoir un Baudouin parmi nous, tu seras donc trèèès bien accueilli ici
Baudouin de Hainaut
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 29 Date d'inscription : 30/12/2013
Feuille de route Mon coeur est: pris par mon épouse et mes enfants. Je suis né à: Mons, dans le Hainaut A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Ven 3 Jan - 10:42
Baudouin de Hainaut a dit:
Me revoilou de MES terres lointaines de Flamandie
Mes aïeux, que d'heures passées sur cette fiche, mais Baudouin est vraiment trop intéressant pour faire un micro-truc trop naze et comme je suis super pointilleuse sur les moindres détails, j'ai du chercher ailleurs que sur Wiki (c'est pour dire )
Alors par contre j'ai du modifier deux-trois trucs par rapport au PV, j'espère que ça ne sera pas trop grave: -Son allégeance. En effet, les comtes de Hainaut ne sont en rien vassaux du comte de Flandres. Ce dernier est vassal du roi de France, alors que 99% du Hainaut sont dans les frontières du Saint Empire Germanique (avec ses copains Ornulf et Radulphe). Mais Tournai appartenant aux deux comtés wallons, j'ai donc arrangé la sauce afin que Baudouin soit vassal: et de Conrad et de Louis VII. Et si vous me croyez pas, je vous poste les cartes du Hainaut de Richilde à Baudouin VI, na
Et pis crotte, on lui pique son comté, il va pas non plus rendre hommage à Thierry, hein.
-Ses prétentions sur la Com...euh le comté: dans le PV, j'ai cru qu'il voulait s'octroyer un fief qui n'était pas à lui, alors qu'en réalité, sa quête est beaucoup plus justifiée que ça. Du coup, j'ai un peu noirci Thierry d'Alsace - et Sibylle par la même occasion - pour rendre le conflit plus réaliste. Normalement je n'ai pas dénaturé le PV de Sibylle ^^
-Trois-quatre fautes de frappe et d'inattention, mais diantre, j'ai la flemme de tout relire.
-Son sex-symbolisme: je l'ai rendu encore plus attirant que dans le gif du PV, j'espère que c'est pas trop grave.
Voilàà et sur ce (perv), je n'ai plus qu'à vous laisser lire et surtout...........deviner qui se cache derrière Baudouin, car vous êtes super-chou, mais je vous connais presque tous (les admins, interdits de tricher, même si je vois d'ici votre réaction )
Henri Plantagenêt
Où apparaît la force, le droit commencer de rayonner
Messages : 401 Date d'inscription : 01/07/2012 Localisation : Angers, le Mans, l'Angleterre, et bientôt Paris...
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Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Ven 3 Jan - 11:08
Henri Plantagenêt a dit:
Moi je sais qui tu es, ta mise en page, ta ponctuation, et tes références au Hobbit t'ont trahie, jeune padawan j'avais déjà de forts soupçons en voyant la longueur de la fiche et les éléments sus-mentionnés, mais le coup de "La Com... le comté" t'ont vendue
Bref, passons aux choses sérieuses, tu as très bien fait de corriger nos possibles erreurs pour faire la fiche de Baudouin, mieux vaut avoir un personnage qui dépote et qui est vraiment comme il faut qu'un personnage un peu hasardeux avec des erreurs qu'on a pas vues passer, je m'empresserai donc de corriger le PV en accord avec ton histoire dès que je rentrerai à Paris ! En plus j'ai appris plein de trucs en lisant ta fiche alors qu'en faisant les PV je me noyais dans des pages wiki sans queue ni tête, Baudouin faisait partie des derniers PV à écrire, bref, j'en pouvais plus, maintenant grâce à toi je comprends mieux l'histoire et je kiffe encore plus le personnage Voilà donc pour les modifs, il n'y a aucun souci, je retoucherai d'ailleurs Sibylle aussi pour la rendre plus intéressante et cohérente avec Baudouin !
Pour en venir à ta fiche elle-même, j'ai a-do-ré, tout est parfait :face:PP compatit de tout coeur pour l'enfance et la mère manipulatrice, il a le même modèle à la maison, sauf qu'elle elle n'a pas décroché de la politique contrairement à Yolande :mdr:tu as parfaitement dépeint le caractère de Baudouin tel que je l'imaginais, le contexte historique et politique est super clair, je suis admirative ta fiche se lit d'une traite, j'aime son adolescence et son côté "j'dis pas ce que je pense" qui agaçait tant Yolande, ça doit être un de mes passages préférés et puis les bataaaaaaaaaaaailles, c'est terrible, c'est bien écrit, et puis son mariage avec Alix de Namur, qu'est-ce que j'aime leur relation la seule chose qui manquerait c'est les autres liens, mais c'était pas précisé dans la présa que c'était mieux de les mettre, et comme ta fiche est déjà très complète je te valide comme ça et mention spéciale à Olivier, que j'aurais bien aimé revoir ailleurs dans la fiche ! :mdr:Bref, nous faudra un lien, en attendant je te valide avec grand plaisir, et (re)bienvenue sur Lords of Treason dearie
P.S : Je laisse quand même Baudouin chez les Flamands, de une parce que ça peuple le groupe, de deux à cause de cette guerre pour le comté justement, ses liens avec le comté de Flandres me paraissent plus cruciaux pour le définir que son alliance avec Louis VII *think*
Tu es à présent validé(e), bienvenue parmi nous . Tu peux à présent t'orienter vers le bottin pour réserver ton avatar. Une fois ceci fait, tu pourras créer tes liens ainsi que tes mémoires tu trouveras d'ailleurs dans ce topic des codes prêts pour t'aider si tu ne sais pas coder. Les rangs se font à partir de 100 messages, et les logements à partir de 200.
Bon jeu parmi nous
Baudouin de Hainaut
ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 29 Date d'inscription : 30/12/2013
Feuille de route Mon coeur est: pris par mon épouse et mes enfants. Je suis né à: Mons, dans le Hainaut A savoir sur ma personne:
Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte... Ven 3 Jan - 11:28
Baudouin de Hainaut a dit:
Ah mince, je me suis auto-trahie Bon alors chuuuuut, on garde ça pour nous (a)
J'ai en effet passé pas mal de temps à comprendre l'arbre généalogique de la Maison de Flandres qui a plein de ramifications ^^ Il n'y a aucun souci pour le laisser chez les flamands, car il fait bien partie de cette famille :)
Pour les autres liens, j'ai pas trop compris Laurence, Jean de Gand et Hugues du Puiseux sont dans la deuxième partie (le premier post était trop court, j'ai du modifier mon second post :) ) et pour Sibylle, je suis en effet resté plus lisse, en essayant néanmoins d'expliquer leur relation :)
Merci en tout cas pour ces compliments Plus j'écrivais, plus je me suis mise à adorer ce perso et rassure-toi, Olivier (aussi présent dans la seconde partie ^^ ) fera certainement des apparitions ponctuelles
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Sujet: Re: Baudouin de Hainaut - Le retour du comte...