Deus Ex Machina ϟ Lord of Treason ϟ
Messages : 149 Date d'inscription : 01/07/2012
| Sujet: Les liens féodaux-vassaliques. Mar 30 Oct - 23:03 | | Deus Ex Machina a dit: | Les liens féodaux-vassaliques Yes, my Lord ! La féodalité est un système politique qui apparaît dès le Xe siècle, même si ses racines sont à chercher du côté du monde carolingien, et qui est à son apogée au XIIe siècle. Si ce siècle est réputé être l'âge d'or du Moyen Âge, rien de plus galvaudé que ce terme qu'on a longtemps présenté comme un facteur de désordres et de déséquilibre, bref une quasi anarchie où nul pouvoir ne semble émerger... Et pourtant, si les entrelacements qui forment la base de ce système sont compliqués à saisir, les liens féodaux-vassaliques forment un ordre rigoureux qui est à la base de toute la société chevaleresque.
La base de la féodalité : le lien de vassalité
La relation vassalique est un contrat par lequel le vassal devient dépendant d’un autre homme, le seigneur. Ce contrat entre le vassal et le seigneur les lie de manière inextricable et surtout les soumet à des obligations réciproques grâce auxquelles ils tirent avantage de cette relation : le seigneur doit protéger et soutenir le vassal, et le vassal doit servir le seigneur. Simple comme bonjour, non ? C’est grâce au serment de fidélité que les deux hommes se retrouvent liés « à la vie à la mort » : le serment permet d’insister sur les valeurs morales qu’impliquent cette relation (entre autres honneur, courage et générosité). Ce serment est prêté lors d'une cérémonie d'hommage : le vassal à genoux met ses mains dans celle du seigneur qui reste debout et lui déclare qu'il devient son homme. Le seigneur relève alors son vassal et le baise sur le bouche, c'est l'osculum. Ensuite le vassal prête serment de fidélité en tant que tel en mettant la main sur les livres saints ou sur des reliques, ce qui le rend sacré. Après quoi, le vassal reçoit un fief, c’est-à-dire une terre de taille variable appartenant au seigneur, mais que celui-ci « offre » à son vassal (attention, le seigneur reste le véritable propriétaire !). Le vassal s’établit sur ce fief et hérite par la même occasion de tout ce qui s’y trouve, y compris les hommes. En échange de quoi, le vassal doit aide et conseil à son seigneur : une aide surtout militaire (si le seigneur entre en conflit, le vassal viendra combattre à ses côtés), mais aussi parfois financière selon la situation du seigneur, et bien entendu, le vassal se doit de siéger à la cour de son seigneur et le conseiller sur les affaires courantes. Réciproquement, le seigneur se doit de soutenir son vassal en cas d’attaque ou tout autre cas de conflit avec un pair : le seigneur joue le rôle de guide et de soutien et doit aider son vassal à prospérer comme un « protégé ». Plus votre personnage est puissant, plus il aura de vassaux prêts à être à son service –et réciproquement s’il est de plus petite envergure, il pourra compter sur au moins un allié puissant pour le soutenir contre ses ennemis.
Un modèle idéalisé
En théorie, rien de plus simple donc : le seigneur s'entoure de vassaux qui lui sont dévoués par le biais d'hommages qui engagent leur honneur et à qui il donne des terres en récompense. Pourtant très rapidement, les limites d'un tel système apparaissent : - Quelques siècles auparavant, le seigneur choisissait directement ses vassaux. A l’époque qui nous intéresse, les choses ont légèrement changé : le fief est devenu héréditaire et se transmet dans la famille du vassal de père en fils. Cependant le seigneur garde en quelque sorte son droit de choix : si le vassal refuse de lui prêter serment, le seigneur est en droit de rompre le lien qui les unit et de donner son fief à un autre. Mais cela suppose que le seigneur ait de véritables moyens de coercition. - ...Ce qui n'est pas forcément évident lorsque les vassaux deviennent aussi puissants que leurs seigneurs : c'est particulièrement le cas pour le roi de France qui a parfois du mal à s'imposer aux comtes d'Anjou ou de Blois. Cela explique également que les plus puissants comtes s'appuient sur des mesnies de fidèles de basse naissance, de simples chevaliers voire sur des mercenaires grassement payés. - Les vassaux ont également tendance à avoir plusieurs seigneurs pour leurs différentes terres ce qui n'est pas sans poser problème au cas où ils sont demandés pour le service qu'ils doivent au seigneur. Pour pallier à cette difficulté, un hommage-lige est institué rapidement qui donne « priorité » à l'un des seigneurs.
Les débordements ne sont pas rares et de nombreux conflits sont apparus au cours des siècles entre seigneurs de divers lieux pour des conflits de juridiction, d'honneur ou de terres. Mais l'insécurité chronique, d'ailleurs bien exagérée par les clercs se résorbe au XIIe siècle par le mouvement de la paix de Dieu et par l'énergique action des comtes et surtout du roi.
La place du roi
La seule personne à ne pas avoir d’obligation envers un autre seigneur est le roi, car c’est lui qui dirige le royaume, même les plus puissants comtes lui doivent le serment de fidélité car dans un modèle théorique, c'est de lui qu'ils tiennent leurs fiefs : ainsi Henri Plantagenêt doit faire hommage pour l'Anjou et la Normandie mais non pour l'Angleterre car ce n'est pas là terre du royaume de France. Si les termes du contrat sont respectés... C'est là une autre histoire ! Mais à partir du XIIe siècle grâce à l'action d'hommes de lettres comme Suger, la place de la royauté évolue nettement et devient de plus en plus prépondérante. De manière idéale, le roi serait au sommet d'une pyramide féodale, les petits seigneurs prêtant hommage aux comtes lesquels prêtent hommage au roi, ce qui en fait en quelque sorte le suzerain. Dans les faits, on met surtout en avant la figure sacrée du roi qui est un protecteur de la paix ainsi que des églises partout dans son royaume, qui rend justice et auquel chacun peut se recommander. Il s'entoure de petits châtelains et chevaliers qui lui vouent une fidélité sans faille car ils lui doivent tout et surtout, il devient impensable d'attaquer directement le roi ou de penser à le destituer combien même on est plus puissant que lui. Ce retour en grâce de la figure royale explique la puissance éclatante d'un Philippe Auguste qui saura jouer de ces contraintes de la féodalité pour s'imposer partout... Mais on n'en est pas encore là !
Loin d'être un facteur de désordre, la féodalité est un système politique et social qui vaut pour les attentes de l'époque : la puissance publique est exercée par les petits seigneurs ou les comtes mais cela permet d'être au plus proche de la population et explique que l'on est loin d'une sorte d'anarchie. Les comtés sont souvent déjà administrés de façon rigoureuse et c'est bien le roi qui commence à récupérer le fruit de ces efforts...
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